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Egypte : développement d’instituts d’études coptes à la fac

Christophe Lafontaine
29 juillet 2019
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Fragment de tapisserie , Egypte, art copte, v. 6e-7e siècle, laine, lin, tissage de tapisserie, musée d'art de Honolulu ©Hiart

L’Université d’Alexandrie et l’Université de Damanhour en Egypte ont chacune créé un nouveau département d’études coptes. Rattrapant un retard par à rapport à leurs consœurs occidentales.


A la mi-juillet, le rédacteur en chef de Watani, l’hebdomadaire de la communauté copte égyptienne, s’est réjoui de trois bonnes nouvelles dans un édito. Youssef Sidhom écrivait ainsi que le projet de loi unifiée sur la famille pour les chrétiens en Egypte est presque achevé et comprend des dispositions sur les successions qui stipulent des parts égales d’héritage pour les hommes et les femmes. Il annonçait aussi que « le comité du Cabinet chargé de légaliser le statut des églises sans licence et des bâtiments apparentés à des églises en Egypte, a approuvé l’octroi de licences à un nouveau contingent d’églises et de bâtiments associés. » Avant ces deux nouvelles, il se réjouissait que deux universités publiques égyptiennes, celle d’Alexandrie et celle de Damanhour (au nord du pays) aient chacune pris l’orientation de créer un nouveau département d’études coptes en leur sein pour l’étude de la langue copte, l’histoire, les arts, les traditions et la culture monastique de cette communauté copte.

Malgré l’ouverture du Musée copte au Caire en 1908, « ce n’est un secret pour personne que les études coptes ont été remarquablement absentes des universités égyptiennes » jusqu’à présent, souligne Youssef Sidhom. « Aujourd’hui, avec l’offre d’études coptes par les universités d’Alexandrie et de Damanhour, cette riche branche du savoir est enfin revenue à la maison », applaudit-il.
Le 25 février dernier, c’était la Faculté des arts et des lettres de l’Université d’Alexandrie, qui en collaboration avec l’Eglise copte orthodoxe, a inauguré le premier institut de ce genre en Egypte. Un projet qui était en gestation administrative et scientifique depuis une petite dizaine d’années.

Essam El-Kordy, le président de l’Université d’Alexandrie, a déclaré le jour de l’inauguration que l’objectif de l’institut était de développer un programme académique de qualité allant jusqu’au doctorat pour tout ce qui a trait à l’art, à la langue et à l’histoire coptes à travers les âges.

L’agence Fides avait aussi et déjà fait savoir le mois dernier qu’« un projet analogue [était] en cours de lancement » à l’Université de Damanhour, chef-lieu du gouvernorat de Beheira. Et ce, au sein de sa faculté des arts qui a par ailleurs organisé début juin sa première conférence sur les études coptes en attendant l’autorisation ministérielle pour l’ouverture d’un nouveau centre d’études coptes. L’événement s’est déroulé sous le patronage de Khaled Abdel Ghaffar, ministre égyptien de l’Enseignement supérieur. Comme l’a rapporté Watani, l’Eglise copte orthodoxe a été invitée à participer à cette première conférence. Anba Pachomius, métropolite de Beheira et Matrouh, a répondu à l’invitation au nom du patriarche Tawadros II et a par ailleurs annoncé un soutien financier de la part de l’Eglise copte pour la création du futur institut. Ebeid Abdel-Ati, le président de l’université de Damanhour, n’a pas manqué d’évoquer l’importance des études coptes, affirmant que l’Egypte regorgeait d’antiquités, de monuments et d’art coptes qui témoignent de l’ingéniosité copte au fil des siècles. « Notre patrimoine copte est profond et précieux. Il se manifeste dans l’héritage tangible de la splendide architecture copte dans les églises et les monastères ; également dans le patrimoine mobilier vu dans les musées, les œuvres d’art et les acquisitions ». Le centre offrira trois spécialités – archéologie copte, histoire et civilisation coptes, arts et langue coptes – menant jusqu’au doctorat. D’après Watani, un protocole de jumelage a aussi été signé avec Anba Thomas, évêque de Qoussiya à Assiout, à environ 350 km au sud du Caire, afin de rendre les études coptes accessibles aux étudiants de Haute-Egypte.

En réalité, les deux universités, celle d’Alexandrie et celle de Damanhour, ont emboîté le pas à la Bibliotheca Alexandrina (BA) qui sans être une université avait toutefois créé l’un des premiers et des plus solides centres d’études coptes en Egypte. C’était en 2013. Et en avril dernier, conjointement avec le Centre d’études coptes de la BA, la Faculté des antiquités de l’Université de Fayoum à une centaine de kilomètres au sud-ouest du Caire (une région riche en patrimoine copte) a tenu sa première conférence sur les antiquités coptes.

A cette occasion, Louay Mahmoud Saied, Directeur du Centre d’Etudes coptes de la Bibliothèque d’Alexandrie, a souligné que les études spécialisées sur la langue et la culture coptes pouvaient apporter une contribution précieuse à la sauvegarde de l’identité plurielle de la nation égyptienne et à la coexistence entre composantes religieuses différentes, les soustrayant à toute dérive sectaire.

Alors que les universités du monde ont consacré depuis longtemps des sections à la coptologie, les universités égyptiennes ont cumulé un retard qu’elles tentent de rattraper. Après des siècles d’indifférence. Hanan Shafei, doyenne de la faculté des arts à l’université de Damanhour a rappelé que « l’identité égyptienne s’est formée au cours de milliers d’années et comprend un élément nettement copte. (…) Cependant, l’intérêt pour les études coptes a dû attendre les siècles plus récents et a été lancé pour la première fois par des chercheurs européens. »

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