Le primat actuel de l’Eglise catholique syriaque, Ignace Youssef III Younan, patriarche d’Antioche des Syriens, a nommé le 17 octobre dernier le père Joseph Shamei, de l’éparchie de Beyrouth, administrateur patriarcal de l’archéparchie de Hassaké-Nissibi, au nord-est de la Syrie. La salle de presse du Saint-Siège s’en est fait l’écho le 31 octobre.
Cette nomination a été choisie « compte tenu des besoins urgents de nos chers fils et filles du diocèse de Hassaké-Nissibi, et dans le but de leur assurer un service spirituel et pastoral, et après les événements récents et dangereux survenus dans la région », a indiqué un communiqué du Patriarcat syriaque catholique.
Le nouvel administrateur patriarcal prend la suite indirecte de Mgr Jacques Behnan Hindo qui était archevêque de Hassaké-Nisibi depuis 1996, et qui s’est retiré pour raison d’âge, à 78 ans, le 22 juin dernier. Pour l’intérim, Mgr Denis Antoine Chahda, l’archevêque d’Alep, 73 ans, avait été nommé dans la foulée administrateur de l’archéparchie de Hassaké-Nissibi. Mais « en raison des nombreux engagements pastoraux et des besoins religieux croissants dans le diocèse d’Alep », il a été déchargé de cette fonction.
L’éparchie d’Hassaké a été érigée le 15 juillet 1957 par Pie XII. Le 3 décembre 1965, Paul VI l’a élevée au rang d’archéparchie d’Hassaké-Nisibi (Nisibi- située en Turquie – a été rajouté à titre honorifique). En 2011, d’après le site catholic-hierarchy.org, qui présente les diocèses de l’Eglise catholique romaine et des Eglises orientales rattachées à Rome, l’archéparchie comptait 35 000 fidèles, 11 paroisses avec cinq prêtres, deux religieux et trois religieuses. Il n’y a pas de statistiques officielles disponibles depuis mais Mgr Jacques Behnan Hindo, se confiant début octobre à L’Aide à l’Eglise en détresse, disait craindre un nouvel exode de chrétiens dans la région et affirmé que « depuis le début de la guerre en Syrie, 50% des fidèles d’Hassaké [avaient] quitté le pays, ainsi que 50% des orthodoxes ».
Le nouvel administrateur apostolique a pris ses fonctions à la tête diocèse dès le 19 octobre, deux jours après sa nomination au cours d’une messe célébrée dans la cathédrale de l’Assomption de Marie à Hassaké qui est le siège archiépiscopal. Il a rencontré les fidèles de son diocèse, les autorités civiles, politiques et religieuses de la région ainsi que le Grand Mufti de la République arabe syrienne, le cheikh Ahmad Badreddin Hassoun, « pour souligner l’importance de l’unité nationale et la nécessité de travailler ensemble pour servir le pays et la prospérité de la région », informe le communiqué du Patriarcat catholique syriaque.
Le nouvel administrateur patriarcal a également rencontré les responsables des Eglises sœurs de la province de Hassaké, dont l’archevêque syriaque orthodoxe Maurice Amseeh (en place depuis août 2017), avec le désir de travailler « dans un esprit fraternel pour prendre soin des fidèles, en particulier dans les circonstances difficiles qui prévalent dans la région ».
Il faut dire que le contexte géopolitique de Hassaké, située à 60 km de la frontière turque, est particulièrement tendu et volatile. Le 9 octobre dernier, les Turcs ont lancé, après le retrait de l’armée américaine de Syrie, une offensive contre les Kurdes au sud de leur frontière avec la Syrie. Ankara voulait éliminer « un corridor terroriste » dans le sud de la Turquie contre la milice kurde des Unités de protection du peuple (YPG) qui a activement aidé la coalition internationale à vaincre militairement les djihadistes du groupe Etat islamique (EI) mais sont considérés comme « terroristes » par Ankara. C’est pourquoi la Turquie souhaitait créer une « zone de sécurité », sorte de tampon large d’une quarantaine de kilomètres en territoire syrien qui séparerait ainsi la frontière turque des positions acquises par les YPG lors du conflit syrien. Désormais, à quelques kilomètres de Hassaké, les Kurdes ont déserté la zone, a fait savoir la Russie, et les forces syriennes affrontent celles de la Turquie. Rendant l’avenir de la zone incertain.
Le 23 octobre, le Président turc avait conclu un accord avec son homologue russe Vladimir Poutine. En échange de la fin définitive de l’offensive turque, il prévoyait le retrait des Kurdes avant mardi dernier.