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Record : 4,55 millions de touristes en Israël en 2019

Christophe Lafontaine
8 janvier 2020
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Touristes au pied de Ha Minsara, une colline basse de grès se trouvant dans le cratère du Makhtesh Ramon, dans le sud d'Israël © Hadas Parush/Flash90

Le nombre de touristes a augmenté en Israël de plus de 10% en 2019, et de plus de 15% dans les Territoires palestiniens. Un défi à relever pour éviter que le tourisme en Terre Sainte ne soit victime de son succès.


Les chiffres du tourisme en Terre Sainte ne cessent de s’envoler. Pour la troisième année consécutive le nombre de touristes entrant en Israël bat tous les records. De fait, le ministre israélien du tourisme Yariv Levin a annoncé le 5 janvier dernier que 4,55 millions de visiteurs avaient passé au moins une nuit en Israël, l’année passée. Contre 4,12 l’an dernier. Soit une augmentation de 10,6% par rapport à l’année précédente, et de 55% par rapport à il y a trois ans.

Le ministre a insisté sur l’ampleur et l’accélération de la progression : « il nous a fallu 30 ans, à partir de 1948, pour atteindre le millionième touriste. Encore 16 ans en 1994 pour atteindre les deux millions de touristes ». Et attendre 2017 pour passer la barre des 3 millions, et 2018 la barre des 4 millions.

Du côté palestinien, en ricochet (puisque l’immense majorité des touristes passe par l’aéroport israélien de Tel Aviv pour venir en Terre Sainte), le nombre de touristes ayant visité les Territoires en 2019 a connu une augmentation de 15,4% par rapport à 2018. Selon les derniers chiffres officiels communiqués par l’agence palestinienne de presse Wafa, ils auraient été 3 520 726.

A noter que les hôtels palestiniens ont enregistré plus de 2,7 millions de nuitées. Cet écart s’explique notamment par le fait que nombreux sont les voyageurs d’un jour à Bethléem qui passent leur nuit à moins de 10 km, à Jérusalem.

En tête de la liste des touristes venus visiter les sites palestiniens, on retrouve « les ressortissants américains, russes, roumains, polonais et italiens », a affirmé la ministre palestinienne du Tourisme et des Antiquités, Rula Maayah.

Zoom sur Israël

Concernant Israël, les principaux pays d’origine des touristes entrés dans le pays en 2019 sont les Etats-Unis (890 000 entrées), la France (338 200), la Russie (296 000), l’Allemagne (268 900), le Royaume-Uni (218 700). Suivis de l’Italie, de la Pologne, de la Chine, de l’Ukraine et de la Roumanie. Fait marquant : le nombre de touristes en provenance de Chine a bondi de 36,7% pour atteindre 156 000 personnes ayant atterri à Tel Aviv.

Pour l’année passée, le tourisme en Israël a généré 22 milliards de shekels (environ 5,7 milliards d’euros) de revenus. Selon Globes, journal financier israélien, les touristes dépensent en moyenne 1 400 $ (plus de 1250 €) par visite.

Le secteur, s’est félicité le ministre israélien du tourisme, a employé directement 153 000 personnes dont 13 600 nouvelles personnes.

De l’importance des budgets marketing

Yariv Levin a expliqué ce succès par ce qu’il nomme « la révolution de la politique de commercialisation » du produit Israël qui a été entreprise ces dernières années. Il s’est agi selon lui du passage d’une focalisation sur le tourisme religieux à celle d’un tourisme de loisirs et de voyages.

Le pays a, à ce titre, offert des incitations aux compagnies aériennes internationales pour ouvrir de nouvelles lignes vers le pays et ouvert un nouvel aéroport à Eilat, lancé une ligne de trains rapides entre Tel Aviv et Jérusalem, desservant l’aéroport Ben Gurion de Lod.

Le ministre s’est particulièrement vanté de l’impact mondial (de la Chine à l’Europe en passant par l’Inde) et réussi de la campagne « Twosunny  Cities, One Break » valorisant les destinations urbaines comme Tel Aviv et Jérusalem, ou encore une campagne encourageant le tourisme d’hiver à Eilat, la fameuse station balnéaire sur les bords de la mer Rouge. Comme prochaine étape, le ministre veut attirer de futurs touristes sur d’autres destinations comme celles des déserts du Néguev et de l’Arava. C’est « là où nous voyons le plus grand potentiel d’augmentation du nombre de touristes et de croissance économique dans toute la région », a confié à Globes le directeur général du ministère du Tourisme, Amir Halevi.

Pour sa part, la ministre palestinienne du Tourisme et des Antiquités, Rula Maayah, a souligné « l’importance de l’intensification » de ses contacts et partenariats avec des institutions touristiques internationales. « En commençant, dit-elle, par établir la présence palestinienne dans tous les forums et expositions touristiques internationaux ». Pour ne citer qu’un exemple, un colloque s’est tenu à Paris (France)pour étudier les partenariats possibles entre acteurs institutionnels et opérateurs privés français et palestiniens. Intitulé « Partenariat de développement et d’affaires dans le Tourisme » et organisé par la Chambre de Commerce Franco-Arabe avec la Mission de Palestine le 20 novembre 2019.

2020 sera peut-être rabat-joie

Malgré les très bons résultats du secteur touristique en Terre Sainte, des nuages apparaissent. Le contexte régional de plus en plus tendu – après que les Etats-Unis ont tué Qassem Soleimani, le chef des forces spéciales iraniennes al-Qods – pose la question de savoir si l’embellie pour le secteur touristique ne prendra pas du plomb dans l’aile. Un responsable du ministère du Tourisme a cependant déclaré, signale le Jerusalem Post, que le ministère n’était pas plus préoccupé que d’habitudepar l’impact potentiel de la géopolitique sur le tourisme.

Par ailleurs, en Israël, la croissance pourrait être ralentie cette année pour des questions budgétaires. Si le directeur général du ministère du Tourisme, Amir Halevi a déclaré qu’Israël était en mesure d’atteindre 5 millions de touristes, il craint cependant que les dépenses publicitaires ciblées ces dernières années pour promouvoir le pays en tant que destination touristique de premier plan qui « ont fait leurs preuves » ne se poursuivent pas « avec la même intensité en raison de réductions budgétaires importantes ». En cause, selon une information du Jerusalem Post, le déficit budgétaire d’Israël qui devrait avoir dépassé 3,5% du produit intérieur brut en 2019. Soit bien au-dessus de l’objectif de 2,9% pour cette année-là.

D’autre part, l’impasse politique dans laquelle se trouve le pays bloque tout vote de budget. Faute de coalition gouvernementale, Israël retournera de fait aux urnes pour la troisième fois en moins d’un an à l’occasion de nouvelles législatives. Repoussant le vote d’un nouveau budget à l’après 2 mars.

Tourisme de masse et revers de la médaille

Face à l’afflux de visiteurs en Terre Sainte (touristes, pèlerins, sportifs, voyageurs d’affaires, patients…), certaines périodes de l’année (notamment durant les fêtes religieuses) peuvent devenir de véritables cauchemars pour les agences de voyages, de pèlerinage comme pour les clients eux-mêmes. Il n’est pas rare de voir des hôtels pleins à craquer, des files d’attente interminables sur les sites touristiques, culturels, naturels ou les lieux saints. Sans compter les embouteillages toujours plus nombreux au pic des saisons.

« Le nombre de chambres d’hôtel devrait cependant augmenter dans les années à venir avec l’arrivée de nouveaux acteurs dans le secteur, dirigés par des sociétés immobilières telles qu’Israël Canada, Nitsba et Azrieli, et avec l’expansion de l’activité des chaînes hôtelières existantes », explique Globes. Ainsi, la chaîne hôtelière israélienne Fattal prévoit d’ouvrir neuf autres hôtels en Israël d’ici 2023. Isrotel a annoncé six nouveaux hôtels dans Tel Aviv et Jérusalem, au cours de la prochaine décennie.

Les appartements Airbnb connaissent eux aussi une croissance accélérée. Le nombre d’appartements à Tel-Aviv étant sur le marché de la location courtedurée ayant déjà dépassé les 10 000.

Pour pallier le problème des embouteillages toujours plus nombreux, notamment à Jérusalem, le ministère israélien du tourisme et le maire de la ville misent sur un téléphérique qui désengorgera les voies d’accès à la vieille ville, au risque de transformer la ville sainte en une sorte de « Disneyland » selon les opposants au projet qui jugent qu’un tel équipement nuit à l’identité de la ville, à de nombreux niveaux (esthétiques, écologiques, politiques, etc…).

Chypre et la Jordanie n’ont pas à rougir

Des deux autres côtés de la Terre Sainte (selon la juridiction du Patriarcat latin), comparés aux résultats israéliens et palestiniens, ceux de la Jordanie et de Chypre sont aussi bons voire meilleurs. Pour ce qui est de la Jordanie (qui mise sur le tourisme religieux), le ministre du Tourisme et des Antiquités, Majd Shweikeh, a déclaré qu’un total de 4 535 496 visiteurs étaient entrés dans le pays cette année, soit une augmentation de 7,6% par rapport à 2018.

Et Chypre, qui a une population de 1,2 millions d’habitants, a vu au cours des 11 premiers mois de 2019, que le nombre de touristes augmentait de 0,9% pour atteindre 3 866 447. Les chiffres pour l’année 2019 complète ne sont pas encore donnés mais les prévisions suggéraient à la mi-décembre que l’île d’Aphrodite pourrait franchir la barre des 4 millions de touristes.

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