Les deux visages de la Custodie
Bien sûr, la photo ci-dessus ne vous a pas éblouis par sa qualité esthétique ou technique. Ce 26 août, je la regarde en pleurant. Le cœur brisé. Dans la nuit, frère Feras Hejazin (à droite) est décédé des suites de son infection à la Covid-19. Il a rejoint au ciel, le frère Edouard Tamer (à gauche) décédé quatorze jours plus tôt, des suites du même satané coronavirus. Frère Edouard était Libanais, frère Feras était Jordanien. Ensemble ils constituaient la fraternité franciscaine du couvent Saint-Antoine de Padoue d’Alep en Syrie où ils avaient été envoyés en mission auprès des chrétiens locaux. Ils rejoignent le cortège des franciscains de la Custodie qui, au long des 800 ans de leur présence dans la région, ont littéralement donné leur vie pour avoir vécu au milieu des gens et pour eux.
La Custodie de Terre Sainte, les pèlerins la connaissent davantage quand elle célèbre avec faste dans les lieux saints. Mais elle a cet autre visage, celui du service, celui de pasteurs « pénétrés de l’odeur de leurs brebis » c’est-à-dire « au milieu de leur propre troupeau », qui rejoignent les hommes dans « leur vie quotidienne » et jusqu’aux « périphéries » de leur existence », comme aime à le dire le pape François.
On l’ignore souvent mais dans la Custodie qui se répartie en cinq groupes linguistiques, alors que les frères sont issus d’une quarantaine de nationalités différentes , les arabophones sont les plus nombreux. Ils sont présents en Egypte, en Israël, en Jordanie, au Liban, en Palestine, en Syrie et y vivent tous les soubresauts politiques, économiques et spirituels de ces pays.
Il ne faut pas oublier à leurs côtés ceux des frères Italiens, Espagnols, Argentins, Mexicains, Croates, Brésiliens, Polonais, Américains, Britanniques qui parlent couramment l’arabe (ou l’hébreu ou le grec) et qui eux aussi ont des missions paroissiales.
Non décidément, la Custodie de Terre Sainte n’est pas un corps étranger à la Terre Sainte qui viendrait « parader » dans les lieux saints au nom de la catholicité latine. D’autant que parmi les frères arabes nombre d’entre eux ont été baptisés dans un rite oriental : arménien, maronite, grec-catholique, syriaque, chaldéen. Quand ils sont ordonnés prêtres, ils le sont d’ailleurs dans leur rite de baptême et bénéficient ensuite, s’ils n’étaient pas latins, de la possibilité de célébrer aussi dans le rite romain.
La Custodie est à l’image du christianisme de Terre Sainte, universelle et locale, au service des pèlerins et des chrétiens locaux. Et depuis 15 ans que je suis à son service, sa mission continue de m’émerveiller. Puissent de nombreuses vocations ici et dans le monde venir soutenir son action. Frères Edouard et Feras priez pour nous.