Région clé des manœuvres géopolitiques des États-Unis, le Moyen-Orient attendait avec impatience les résultats d’une élection qui aura tenu le monde en haleine pendant toute une semaine. D’Israël en passant par l’Arabie Saoudite, l’Égypte ou l’Iran, la nouvelle de la victoire du démocrate Joe Biden face à Donald Trump n’a pas eu la même résonance.
« Merci Donald Trump. Un incroyable ami d’Israël quitte la Maison Blanche ». L’édito du rédacteur en chef d’Israel Hayom, quotidien israélien le plus distribué du pays, donne l’ambiance de ce lundi. C’est un précieux allié de l’État Hébreu qui va devoir faire ses valises. Reconnaissance de Jérusalem comme capitale d’Israël et de l’annexion du Golan, plan Kushner, fin des subventions américaines pour l’Unrwa, normalisation avec trois pays arabes (Émirats Arabes Unis, Bahreïn, Soudan)… Donald Trump, a, pendant quatre ans, multiplié les cadeaux à l’égard d’Israël, rompant avec la ligne traditionnelle de Washington en faveur d’une solution à deux États.
« L’arrivée du candidat démocrate ne devrait pas défaire cette alliance historique, qui dépasse les relations personnelles », estime Times of Israël. Joe Biden est fin connaisseur d’un dossier qu’il suivait lorsqu’il était le vice-président de Barack Obama. « Même si aucune rupture de la politique de Washington dans la région n’est attendue avec l’arrivée du nouveau président, les « amis » de Donald Trump devront désormais s’accommoder de relations bien moins privilégiées », juge, moqueur, le média libanais L’Orient le Jour.
Inquiétudes face au dossier Iranien
Joe Biden, fervent partisan d’une solution à deux États, devrait rétablir les liens diplomatiques et financiers avec les Palestiniens. Mais sans plus, estime, désabusé, Al-Quds, principal journal palestinien : « Personne ne s’attend à ce que Biden parvienne à un renversement spectaculaire de la politique américaine envers Israël, ou qu’il apporte la solution juste que nous, les Palestiniens, voulons. »
Ce qui inquiète les médias de la région, c’est l’engagement pris par Joe Biden de revenir dans l’accord sur le nucléaire iranien. Imaginé sous l’impulsion de Barack Obama en 2015, le texte a été jeté à la poubelle par Donald Trump en 2018, dans une logique de rapprochement avec Israël et l’Arabie Saoudite. Un dossier dans lequel les deux pays auraient « beaucoup à perdre » dans leur quête pour l’hégémonie régionale, estime l’Orient le Jour, pendant que Times of Israel s’interroge : « Biden cherchera-t-il à faire grandir la toute jeune relation israélo-saoudienne pour en faire une paix durable pour la région ? Ou en reviendra-t-il à une politique de soutien envers l’Iran ? »
L’Arabie saoudite, qui espérait une victoire du milliardaire américain, a attendu jusqu’à dimanche soir pour « féliciter » Joe Biden de sa victoire. La presse saoudienne s’est aussi passée de tout commentaire jusqu’à la réaction officielle. Seul le quotidien Okaz a fait part dimanche matin des incertitudes quant à l’avenir de la relation unissant les deux alliés. « Que ce soit sur la paix au Moyen-Orient, le dossier iranien ou la montée en puissance des Frères musulmans… Nous attendons de voir », écrivait le journal.
Dans cette incertitude face à la politique qu’adoptera Joe Biden dans la région, Haaretz penche pour l’option du renouveau : « Biden va découvrir que le Moyen-Orient n’est pas un film qui peut être rembobiné, et que l’atomisation que la région a subie – pas seulement à cause de Trump – l’obligera à élaborer une nouvelle stratégie ». Si les recours judiciaires de Donald Trump ne portent pas leurs fruits, Joe Biden devrait être officiellement investi le 20 janvier prochain. Mais même avant cela ses déclarations de politiques étrangères seront scrutées.