Pentecôte : prière d’«intercession urgente» pour la paix

Depuis le 10 mai, 83 Palestiniens ont été tués, dont au moins 16 enfants, et sept Israéliens ont été tués, dont un enfant. C’est-à-dire depuis le début des raids de représailles israéliens à des tirs de roquettes du Hamas, en réponse aux violences à Jérusalem, ces dernières semaines.

Sur ce fond, des manifestations et des émeutes généralisées se propagent et se sont intensifiées ces derniers jours dans tout Israël, en particulier dans les villes à forte population palestinienne. La minorité des Palestiniens citoyens d’Israël, qui représente 20% de la population israélienne, descend principalement des Palestiniens qui sont restés en Israël après la création de l’Etat hébreu en 1948. La plupart se sent proche des Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza. Depuis trois jours, des manifestants palestiniens d’Israël ont été attaqués par des Juifs nationalistes et des personnes juives ont été agressées par des émeutiers palestiniens citoyens israéliens, et leurs biens vandalisés.

Dans les territoires palestiniens, ont eu lieu ces derniers jours des affrontements entre les forces de sécurité israéliennes et des Palestiniens à l’entrée de la ville de Ramallah, en Cisjordanie, près de la colonie juive de Beit El, et au checkpoint de Qalandia près de la même ville. Des heurts ont aussi éclaté entre l’armée israélienne et les Palestiniens dans la ville d’Hébron,

« En cette période de troubles à Jérusalem et dans toute la Terre Sainte », le Patriarcat latin de Jérusalem, en collaboration avec le Comité épiscopal des religieux masculins et l’Union des religieuses, a décidé d’inviter « tous les fidèles, évêques, prêtres, religieux et laïcs à prier ensemble à la veille de la fête de Pentecôte », soit le 22 mai, à la basilique Saint-Etienne des Pères dominicains à Jérusalem. Ce sera « une Prière pour les dons du Saint-Esprit, une intercession urgente pour la justice et la paix », précise la plus haute autorité catholique en Terre Sainte.

Villes mixtes en Israël fracturées

Lod, à 45 km au nord-ouest de Jérusalem et où se trouve l’aéroport international Ben Gourion, (tous les vols sont actuellement déroutés) a été l’une des villes les plus touchées par les violences communautaires en Israël. Plus d’un tiers de ses 80 000 habitants sont des Palestiniens citoyens d’Israël. Les violences ont éclaté dans la nuit de mardi à mercredi. D’après le Times of Israel, trois synagogues, de nombreux commerces et des dizaines de voitures ont été incendiés.

Des Israéliens extraient des Torah le synagogue de Lod, à la suite d’une nuit de violentes émeutes de résidents palestineins citoyens d’Israël dans la ville, le 12 mai 2021. ©Yonatan Sindel / Flash90

Le maire de la ville a affirmé que l’hôtel de ville et un musée local avaient également été attaqués « Nous sommes au bord de la guerre civile », a-t-il déploré dans les colonnes du Times of Israel, au lendemain des émeutes nocturnes, regrettant que « des dizaines d’années de coexistence entre Juifs et Palestiniens citoyens d’Israël dans cette ville mixte se soient effondrées ».

Lire aussi >> « La paix exige la justice »: l’appel du Patriarcat latin après les violences à Jérusalem

Un cimetière musulman a également été incendié dans la nuit. La situation a commencé à se dégrader entre jeunes Palestiniens citoyens d’Israël et groupes de juifs extrémistes dans la ville, après la mort lundi d’un Palestinien citoyens d’Israël tué par balle par un résident juif en marge d’une violente manifestation. Le président israélien, Reuven Rivlin, a condamné les émeutes de Lod, les qualifiant de pogrom. Le 11 mai, le Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu a déclaré l’état d’urgence à Lod.

Hier, la télévision israélienne a publié des images d’un groupe d’extrême droite israélien en train de lyncher un homme arabe – probablement seulement parce qu’il était arabe -, après avoir arrêté sa voiture et l’avoir laissé inconscient et saignant dans une rue de Bat Yam, près de Tel Aviv. Peu avant l’incident, des vidéos circulant sur internet montraient des dizaines de personnes criant « Mort aux Arabes ».

D’autres violences entre Juifs et Palestiniens citoyens d’Israël ont aussi éclaté ces derniers jours dans plusieurs autres villes du pays, comme Haïfa, Jaffa, Ramle, Kafr Kassem ou encore Jisr al Zarqa, Wadi Ara, Hadera, des villes près de Césarée. Aussi à Saint-Jean d’Acre où des Palestiniens citoyens d’Israël ont passé deux heures à défoncer le magasin d’un juif pour finalement le brûler.

Aujourd’hui, le porte-parole de la police, Micky Rosenfeld, a déclaré à l’AFP que la violence se situait à un niveau jamais atteint depuis des décennies.

Le vif émoi du grand rabbin séfarade d’Israël

Le grand rabbin séfarade d’Israël Yitzhak Yossef a appelé à cesser les agressions commises par des Juifs : « Des citoyens innocents sont attaqués par les organisations terroristes, le cœur est lourd et les images difficiles mais nous ne pouvons pas nous laisser entrainer dans des provocations et des agressions », a-t-il précisé.

« Les émeutiers à Lod et Acre ne représentent pas les Palestiniens citoyens d’Israël, les émeutiers à Bat Yam (…) ne représentent pas les Juifs israéliens, la violence ne dictera pas nos vies », a relevé le chef de l’opposition Yaïr Lapid, qui tente de former une coalition d’union nationale.

Lire aussi >> Tensions à Jérusalem : des Palestiniens bientôt expulsés ?

De son côté, M. Netanyahu a relevé dans un communiqué que « ce qu’il se passe depuis ces derniers jours dans les villes d’Israël est insupportable… rien ne justifie le lynchage d’Arabes par des Juifs et rien ne justifie le lynchage de Juifs par des Arabes. »

Le ministre de la Défense, Benny Gantz, a ordonné que 10 compagnies de réserve de la police des frontières soient déployées pour soutenir les efforts de la police visant à mettre un terme aux affrontements dans les villes judéo-arabes du pays.

A Lod, Saint-Jean d’Acre, Haïfa, Tel Aviv-Jaffa, des responsables politiques locaux arabes et juifs ont lancé un appel au calme conjoint.