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Ce que dit la découverte de charniers de croisés à Sidon

Christophe Lafontaine
4 octobre 2021
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Le château Saint-Louis à Sidon, construit en 1253 à Sidon au Liban, par le roi Saint-Louis aux abords duquel ont été retrouvées deux fosses communes croisées © O.Mustafin / Wikimedia Commons

De récentes analyses de squelettes découverts à Sidon au Liban, nous en apprennent plus sur l’origine de croisés tombés au XIIIe siècle pour défendre la ville, et le rôle qu’a pu tenir saint Louis pour leur inhumation.



Tués à l’épée ou à la hache, décapités, abattus par des masses, criblés de flèches. En un mot, massacrés. Le sort des croisés qui se battirent pour défendre, au milieu du XIIIe siècle, Sidon, l’actuelle Saïda au sud de Beyrouth, a assurément été d’une brutalité inouïe. C’est ce que des chercheurs de l’université de Bournemouth au Royaume-Uni ont fait savoir à travers un communiqué du 14 septembre dernier. Dans le but de rendre compte de l’étude qu’ils ont récemment publiée dans la revue scientifique PLoS ONE avec deux autres chercheurs britanniques.

L’équipe a analysé des squelettes humains retrouvés en 2015 dans deux fosses communes découvertes dans les douves sèches du château de Saint-Louis (Qalat al-Muizz) à Sidon, port stratégique pour les croisés pendant plus d’un siècle. En pleine guerre, faute de temps pour offrir une sépulture chrétienne individuelle aux croisés tombés au combat, l’usage de la fosse commune s’est imposé.

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Les restes ont été identifiés comme appartenant à au moins 25 croisés en raison de la présence dans les tombes d’une pièce de monnaie en argent datant du milieu du XIIIe siècle et de boucles de ceinture franques en alliage de cuivre.

Grâce à la datation au radiocarbone, les chercheurs estiment que les soldats sont probablement morts lors des batailles de 1253 ou 1260, lorsque Sidon, détenue par les chrétiens, a été directement attaquée par le sultanat mamelouk (1253 ap. J.-C.) et les Mongols d’Ilkhanate (1260 ap. J.-C).

Combats d’une extrême violence

La découverte est vraiment rare soulignent les chercheurs car les charniers de cette période sont plutôt introuvables. « Le nombre minimum de 25 individus dépasse de manière significative l’échelle du seul autre contexte d’inhumation de masse connu rapporté pour la période des croisés » indiquent les auteurs de l’étude en faisant référence aux squelettes de cinq hommes tombés à la bataille du Gué de Jacob, situé entre la Haute-Galilée et le plateau du Golan, qui opposa, le 23 août 1179, l’armée ayyoubide dirigée par Saladin à l’armée du royaume de Jérusalem.

Les experts, après l’analyse des squelettes de Sidon, ont conclu que les squelettes étaient ceux d’hommes et d’adolescents. Il n’y avait donc sur le champ de bataille ni femmes ni enfants.

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Certains des squelettes « montrent des blessures d’épée à l’arrière du corps, suggérant que les soldats ont été attaqués par derrière, fuyant probablement au moment où ils ont été abattus. D’autres ont des blessures d’épée à la nuque, indiquant qu’il s’agissait peut-être de captifs exécutés par décapitation après la bataille », résume le communiqué de l’université britannique de Bournemouth.

Les traces sur les squelettes montrent combien les combats ont été brutaux. « Une forte prévalence de traumatismes périmortem, incorporant une force tranchante, une force pénétrante et une force contondante, démontre que le conflit dans lequel ces individus sont morts était extrêmement violent et destructeur », écrivent les chercheurs. La concentration des blessures à la tête et aux épaules de certains soldats serait d’après eux « compatible » avec le fait qu’ils auraient été à pied quand les attaquants, eux, auraient été à cheval.

Quid d’une intervention royale ?

L’analyse d’isotopes dentaires ainsi que des études ADN ont aussi permis de préciser l’origine des soldats. Certains étaient nés en Europe, d’autres étaient d’ascendances locales proche-orientales, et quelques-uns étaient d’origine mixte, autrement dit, des descendants de croisés qui s’étaient unis à des femmes appartenant à la population locale. En cohérence avec la composition sociale des croisés, d’après les sources historiques.

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Selon les archives historiques, saint Louis qui avait pris la tête de la septième croisade, était présent en Terre sainte au moment de l’attaque de Sidon en 1253. Le roi « s’est rendu en ville après la bataille et a personnellement aidé à enterrer les cadavres en décomposition dans des fosses communes comme celles-ci », explique via le communiqué de l’université de Bournemouth, le Dr Piers Mitchell de l’Université de Cambridge, qui a collaboré à l’étude. 

De fait, les chroniques de Jean de Joinville, sénéchal de Champagne, témoin oculaire de la septième croisade rapportent qu’« Il [saint Louis, ndlr] avait personnellement porté les corps, tous pourris et puants, pour les placer dans les tranchées dans le sol, et il ne s’est jamais couvert le nez, bien que d’autres l’ont fait ». Et le chercheur de suggérer alors : « Ne serait-il pas inouï que le roi Louis lui-même ait aidé à enterrer [les 25] corps ? »

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