« C’est un signe d’espoir, un signe d’espérance », se réjouit le curé catholique de Gaza, le père Gabriel Romanelli. L’Associated Press a rapporté hier que le Cogat, l’organisme de liaison militaire d’Israël avec les Territoires palestiniens, a annoncé que 500 chrétiens de Gaza pourront être autorisés à visiter leurs familles et célébrer Noël en Israël et en Cisjordanie. C’est-à-dire notamment à Bethléem, à Nazareth ou à Jérusalem.
Et « même si c’est un permis pour moins de la moitié des chrétiens à Gaza », souligne le père Gabriel Romanelli, il reconnaît que l’annonce israélienne est bienvenue « tant la pression au quotidien est immense » pour les habitants de Gaza. Et le pasteur de la paroisse latine de la Sainte-Famille de préciser que « contrairement aux autres années, les autorités israéliennes ont annoncé qu’il n’y aurait pas de restrictions selon les âges ».
Pas de permis distribués depuis deux ans
Pendant des années, explique-t-il, les jeunes entre 16 et 35 ans n’ont jamais eu de permis. Israël a souvent défendu sa politique de limiter le nombre de permis pour les Gazaouis voyageant à l’extérieur, affirmant que de nombreux Palestiniens de Gaza restaient illégalement lorsqu’ils obtenaient des permis de courte durée (généralement un mois).
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C’est pour cela aussi qu’en guise de dissuasion, les autorisations de sortie de la bande de Gaza ne concernaient généralement qu’une catégorie d’âge ou qu’une partie de la famille. Les autorités ne distribuant par exemple qu’un permis au père mais pas à la mère et aux enfants. « La dernière fois que les autorités israéliennes ont donné des autorisations, cela a concerné surtout des personnes très âgées, des enfants ou les personnes qui voulaient aller en Jordanie ».
Si Israël a plusieurs fois, dans le passé, autorisé les chrétiens gazaouis à quitter l’enclave palestinienne à l’occasion des fêtes de la Nativité, cela fait deux ans que ce n’était pas arrivé. L’an dernier pour raison de Covid. En 2019, pour des raisons de sécurité. Par ailleurs, Israël prévoit aussi d’élargir l’accès à Jérusalem pour les chrétiens vivant en Cisjordanie et d’autoriser à quelque 200 chrétiens de Gaza de traverser Israël pour se rendre en Jordanie.
Derrière Noël, la question des mariages
Pour les Gazouis, la nouvelle intervient alors que les déplacements hors de la bande de Gaza ont été restreints depuis la guerre de mai dernier qui a duré 11 jours entre Israël et les dirigeants du Hamas, au pouvoir à Gaza. « Ces derniers mois, cependant, Israël a commencé à assouplir certaines des restrictions, accordant à plusieurs milliers de Gazaouis des permis pour travailler à l’intérieur d’Israël dans le cadre de tentatives égyptiennes discrètes de négocier un cessez-le-feu à long terme », a fait savoir l’Associated Press.
Le père Gabriel Romanelli explique qu’une liste de 761 fidèles catholiques et orthodoxes, préparée en septembre, a déjà été présentée. Et l’Eglise orthodoxe a rajouté la semaine dernière 150 noms, dit-il. Selon les chiffres officiels qu’il cite, les chrétiens – majoritairement grecs-orthodoxes – sont 1 077 dans la bande de Gaza dont 134 catholiques. Une infime minorité au regard des plus de 2 millions d’habitants musulmans qui vivent dans cette enclave de moins de 400 km².
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Et si les permis accordés à Noël permettent de visiter les familles, de prier sur les lieux saints, ils donnent également aux jeunes femmes et aux jeunes hommes chrétiens de Gaza l’occasion de rencontrer de nouvelles personnes. Car à l’aune des statistiques démographiques, la problématique des futurs mariages des chrétiens Gazouis se pose. « Cela commence à être un grand problème », s’émeut le père Gabriel.
« Nous rêvons de fêter Noël tout seuls un jour ici »
Les mouvements à Noël et à Pâques vers Israël, la Cisjordanie ou l’étranger sont régis par un régime de permis militaire fondé par l’Etat hébreu en 1991. C’est de la même époque que remonte la tradition qui voit le patriarche latin de Jérusalem célébrer la messe de Noël à Gaza de manière anticipée comme un signe d’encouragement pour les paroissiens de la Sainte-Famille. Cette année, Mgr Pizzaballa s’y rendra les 17, 18 et 19 décembre. Il visitera quelques familles et écoles. Il célèbrera la messe solennelle de Noël, le 19 décembre.
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A l’occasion de sa visite, les enfants joueront une crèche vivante. En attendant, si le temps de l’Avent n’est pas encore là, les paroissiens commencent déjà à décorer l’église. Et pour ceux qui n’auront pas obtenu de permis pour les vacances, la messe de Noël aura lieu le 24 décembre à 19h, suivie d’un chocolat chaud, d’un loto dans une ambiance festive et musicale.
Et le père Gabriel, au nom des prêtres et des religieuses qui servent à Gaza, conclut songeur : « Nous rêvons de fêter Noël tout seuls un jour ici. Cela signifierait que tous les chrétiens auront réussi à aller à Bethléem comme c’est leur droit. Nous prions pour ça, nous travaillons pour ça. »