Lundi fut une première mais qui n’a pas été du goût de chacun. Une quarantaine de Palestiniens de Cisjordanie occupée, aux côtés des passagers israéliens, ont embarqué pour Larnaca à Chypre depuis le flambant neuf aéroport Ramon, ouvert en janvier 2019 et situé à l’extérieur de la ville balnéaire d’Eilat, dans le sud d’Israël.
Ce vol a eu lieu dans le cadre d’un projet-pilote du ministère israélien de la Défense en coopération avec les autorités aéroportuaires israéliennes approuvé le 2 août dernier, autrement dit une quinzaine de jours après la visite du président américain Joe Biden …
Ledit programme autorise les Palestiniens de Cisjordanie à utiliser, en groupe et non en individuel, les infrastructures aéroportuaires israéliennes pour certains vols à l’international.
Un trajet-retour est prévu pour vendredi 25 août, d’après le Times of Israel. Normalement, des vols à destination d’Antalya et d’Istanbul en Turquie, devaient également commencer à opérer lundi dernier, mais l’Autorité aéroportuaire israélienne a annoncé dimanche le report de ce vol inaugural, sans préciser de date. A noter que le 23 août, le président palestinien Mahmoud Abbas s’est rendu en visite officielle en Turquie où il s’est s’entretenu avec le président turc Recep Tayyip Erdogan.
Les Gaziotes pas concernés
En tous les cas, pour pouvoir monter à bord à destination de Chypre, les passagers palestiniens ont dû passer un contrôle de sécurité avant de quitter en bus la Cisjordanie occupée en direction du sud israélien. Ils ont aussi effectué les contrôles habituels, communs à tout passager, une fois à l’aéroport.
A cette fin, l’unité de coordination des activités gouvernementales dans les territoires (COGAT), l’organe militaire israélien qui supervise les activités civiles dans les territoires palestiniens, a travaillé avec le Shin Bet (le Service de sécurité intérieure israélien) et la police israélienne. Et pour l’heure, les Palestiniens de Gaza ne sont pas autorisés à profiter des vols au départ de Ramon.
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Habituellement, les Palestiniens de Cisjordanie occupée qui décident de voyager en avion à l’étranger sont contraints de se rendre par voie terrestre – via le pont Allenby – à l’aéroport d’Amman en Jordanie voisine. Mais au poste frontière généralement bondé, les retards sont souvent importants. L’autre solution est de réussir – mais c’est difficile – à obtenir un permis d’entrée spécial en Israël, afin d’embarquer à l’aéroport Ben Gourion de Lod, près de Tel Aviv.
Les dissuasions de Ramallah
Du côté des Palestiniens, l’ouverture de l’aéroport de Ramon aux passagers palestiniens a suscité de nombreuses critiques. D’une part, pour eux, les vols depuis Ramon ne facilitent guère plus le voyage des Palestiniens vivant dans les territoires occupés par Israël étant donné qu’ils doivent faire de nombreux kilomètres avant d’arriver à Eilat.
D’autre part, « alors qu’Israël a tenté de présenter cette décision comme un effort pour améliorer les conditions de vie des Palestiniens, les critiques ont déclaré que les mesures ne traitent pas les humiliations quotidiennes de l’occupation qui dure depuis des décennies ni n’ouvrent la voie à un Etat palestinien », a résumé Al-Jazeera.
Le journal israélien Haaretz, a expliqué que ce voyage était en fin de compte vu par une grande majorité de Palestiniens comme un « acte de normalisation » avec l’ennemi israélien.
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De ce fait, l’Autorité palestinienne, rejetant ouvertement le programme-pilote israélien, a affirmé que cette décision n’avait fait l’objet d’aucune coordination avec les Palestiniens et a appelé les Palestiniens de ne pas emprunter les vols depuis Ramon, estimant au contraire que les Palestiniens devaient bénéficier de leur propre aéroport.
« Si l’occupation veut assouplir les choses pour les Palestiniens, qu’elle ouvre l’aéroport de Jérusalem », a ainsi déclaré le Premier ministre palestinien Mohammad Shtayyeh, en faisant allusion à l’aéroport de Qalandiya, à Jérusalem-Est.
Créé en 1924 sous le mandat britannique, il fut utilisé par les Palestiniens jusqu’en 1967 – guerre des Six Jours – lorsque l’armée israélienne a pris le contrôle de la partie orientale de la Ville sainte et occupé la Cisjordanie. Israël l’utilisa ensuite pour des vols intérieurs avant de le fermer définitivement au trafic en 2000, au début de la seconde Intifada. L’aéroport est aujourd’hui désaffecté. Celui de Gaza a été détruit par Israël en 2001.