« Je n’ai pas pris de cours pour devenir cardinal, j’apprendrai en le devenant ». Humble et lucide, le patriarche latin semble prêt à assumer ce statut honorifique et les engagements qui lui incomberont. « Je comprends, d’après les réactions, que ma responsabilité est aussi d’être une voix de la communauté chrétienne, et pas seulement de la communauté chrétienne : une voix de Jérusalem, une des voix, bien sûr, mais une voix de Jérusalem, tout d’abord pour l’Église, mais aussi pour la communauté internationale, sur la vie de la communauté chrétienne, en premier lieu, mais aussi sur la vie en générale. »
« Nous vivons dans un monde très compliqué, a poursuivi le futur cardinal en s’adressant aux journalistes réunis en conférence de presse le 21 septembre, à la veille de son départ pour Rome. A la croisée de nombreuses tensions culturelles, religieuses et politiques, comme chacun le sait, et il est donc très important d’être une voix sereine, mais en même temps claire et forte, autant que possible, de Jérusalem vers le monde. Mais je verrai comment les choses évolueront. »
Une nomination significative pour des Chrétiens en manque de reconnaissance
Concernant les objectifs à atteindre, la liste est longue. Dans le contexte d’une recrudescence des actes anti-chrétiens, sa Béatitude a conscience des attentes : « Jérusalem est l’Eglise mère, elle doit pour cela rester connectée avec les autres Églises de la région. »
Mgr Pizzaballa a souligné également l’importance renouveler l’entente avec les autres institutions chrétiennes : « Je pense que nous devrions faire en sorte que les Églises travaillent mieux ensemble. Nous devons viser une meilleure coordination entre nous tous, pour faire davantage d’autant que nous travaillons sur les mêmes questions de projets de logement, d’emploi etc. Mais il est très important pour nous de ne pas nous contenter d’apporter une aide, mais de créer des opportunités durables. C’est le défi que nous devons relever aujourd’hui. Nous devons créer les conditions et soutenir autant que possible l’autosuffisance. Je pense que c’est la clé pour l’avenir. »
Des signes encourageants
Dans un contexte de crispation religieuse, le patriarche a exprimé son heureux étonnement d’avoir reçu des félicitations de la part de nombreuses autorités religieuses, les chefs de toutes les Eglises mais aussi de nombreux rabbins, muftis et du Waqf, ainsi que des autorités civiles du pays. Sans compter l’immense joie suscitée chez les Chrétiens. Cette allégresse commune est un vrai message d’espoir.
Répondant aux questions des journalistes sur les récents propos de la diplomatie vaticane s’agissant des attaques contre les chrétiens, Mgr Pierbattista Pizzaballa, a déclaré : « Il semble que la voix des modérés ne soit pas entendue et que l’extrémisme ou les différents extrémismes deviennent la seule façon d’entretenir des relations. C’est pourquoi il est très important à nouveau de travailler ensemble. Nous sommes en contact avec tous les organismes, les autorités civiles, les autorités religieuses, la police et tous les autres afin de traiter ce problème de manière appropriée. »
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À titre d’exemple, il rappelle les efforts de collaboration avec la police israélienne, depuis la création – sur une initiative privée – d’une ligne téléphonique disponible pour toute personne témoin ou victime d’agression : « Il est très important de savoir ce qui se passe afin de mieux comprendre le problème et d’y remédier. Dans le passé, le phénomène était nié. Aujourd’hui, il ne l’est plus et c’est positif parce que la prise de conscience clarifie également le contexte et permet d’aborder le problème correctement. »
En vue de remédier à ces attaques, le patriarche a confié être en relation étroite avec de nombreux rabbins mais il a précisé : « Il est très important de travailler discrètement, avec sagesse, et de laisser les autorités religieuses s’adresser à leurs propres fidèles pour leur faire comprendre que le respect de l’autre est quelque chose qui n’est pas facultatif, mais qui est une nécessité pour tous, partout, même ici. »
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- Le patriarche a aussi rectifié une erreur fréquente : il n’est pas le premier mais le second patriarche de Jérusalem à être élu cardinal. Le premier fut Filippo Camassei, crée cardinal en 1919, et qui la même année avait dû partir résider à Rome. Lui, Pizzaballa, est donc le premier cardinal résident.