Entre ses 8 et ses 25 ans, Peter a vécu au cœur de la Silicon valley,
en Californie. Ce jeune entrepreneur des environs de Bethléem a décidé de revenir vivre en Cisjordanie pour lui offrir ses talents d’innovateur.
Des États-Unis, Peter Abualzolof n’a pas gardé qu’un fort accent américain. Il y a aussi cette dégaine décontractée, ce goût du travail et de la réussite… Et bien sûr la passion de l’innovation et des nouvelles technologies, que le Palestinien de 27 ans a probablement héritée de sa Californie adoptive. Il faut dire qu’il a passé l’essentiel de sa vie à San José, dite “capitale de la Silicon valley”, à quelques minutes à pied des sièges de Google, E-bay et Apple. Loin, très loin, des champs d’oliviers et des maisons à toit plat qui l’ont vu naître.
Originaire de Beit Sahour, village chrétien proche de Bethléem, Peter a quitté la Palestine à 8 ans, en 1996, suivant ses parents et ses deux grands frères. Une partie de la famille, côté maternel, avait déjà émigré en Californie.
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Tailleur dans une boutique de la baie de San Francisco, le père de Peter a beaucoup travaillé pour offrir à ses fils un quotidien semblable à celui de leurs camarades de classe. “Je jouais aux jeux vidéo comme eux, je partais en vacances comme eux… Je suis devenu très américain”, raconte le jeune homme qui assure ne pas avoir eu de problèmes d’intégration.
En l’espace de 17 ans, ce chrétien non pratiquant n’est revenu que deux fois en Palestine : en 1999, pour revoir sa grand-mère paternelle avant sa mort, puis en l’an 2000, un mois avant le début de la seconde intifada. Mais son cœur restait de l’autre côté de l’Atlantique, où il avait ses repères, ses amis. Et son avenir…?
Coup de foudre
En 2013, Peter retourne en Cisjordanie pour la troisième fois. Il n’y passe que dix jours, ne fait aucune rencontre marquante et ne visite pas d’endroits particulièrement “excitants”. Mais ce séjour va changer sa vie. A son retour aux États-Unis, il ne pense plus qu’à elle : la Palestine de ses racines. “Je n’en dormais plus la nuit, c’est comme si j’étais amoureux !” se souvient-il en riant. Il est notamment intrigué par les entrepreneurs palestiniens et lit des articles à leur sujet sur son iPad, lors de ses nuits blanches.
À ce moment-là, le jeune homme travaille dans une start-up à succès de Californie. Son salaire, le plus élevé de l’entreprise, lui permet d’avoir une voiture neuve et de réserver de nombreux billets d’avion sans regarder à la dépense.
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Pour ses parents, c’est mission accomplie : leur plus jeune fils aura une vie plus confortable que la leur. Mais l’argent n’intéresse pas vraiment Peter. “Mon train de vie actuel est bien plus modeste qu’à l’époque, mais je suis plus heureux”, assure celui qui vit désormais à Ramallah, capitale de l’Autorité palestinienne. Les choses se sont jouées en seulement quelques semaines.
Après le “coup de foudre”, Peter décide de vivre trois mois en Cisjordanie, à titre d’essai pour un éventuel nouveau départ. “Là, j’ai très vite rencontré d’autres innovateurs qui sont aujourd’hui mes plus proches amis. Je me suis senti bien ici. La Palestine était comme une chaussure parfaitement adaptée à la forme de mon pied.” Il y apprécie surtout l’intensité des rapports humains : “C’est quand même fou, de pouvoir devenir meilleur pote avec son chauffeur de taxi !”
Virage à 180 degrés
Peter rêve d’aider la Palestine, mais pas comme un super héros convaincu de pouvoir la sauver. Quelques mois après son arrivée, il crée une start-up, Mashvisor, développe un site Internet qui a pour objectif d’accompagner les particuliers dans leur recherche de biens immobiliers. “C’est une application en ligne. Nous collectons les données et les analysons pour aider l’utilisateur à trouver le meilleur investissement financier pour lui…” Clients et maisons se trouvent néanmoins… aux États-Unis. “Les murs, ça n’existe pas dans le marché virtuel, rappelle Peter dans un sourire.
On travaille pour les Américains mais on est basé en Palestine, ce qui crée des emplois ici.” L’entreprise n’a pas deux ans et le jeune entrepreneur est déjà entouré de quatre salariés à plein temps et deux stagiaires. Et Peter espère se développer encore rapidement.
Ce virage à 180 degrés a beau le rendre heureux, Peter a beaucoup surpris ses parents et amis : ils l’ont d’abord pris pour un fou. Pourquoi renoncer au confort de la vie américaine pour retourner dans l’enfer du Proche-Orient ? “Mes parents essaient toujours de me convaincre de rentrer aux États-Unis… Mais maintenant, je crois que c’est simplement parce que je leur manque. En fait, ils sont fiers de moi et de ce que j’essaie de faire pour la Palestine.”
Dernière mise à jour: 19/11/2023 21:53