Sur 500 permis annoncés par les autorités militaires israéliennes autorisant les chrétiens de Gaza à aller à Bethléem pour Noël, environ 250 ont été effectivement délivrés à ce jour. Touchant moins du quart des fidèles.
Droit ou privilège, le curé de Gaza tranche : « les chrétiens de Gaza ne devraient pas avoir besoin de permis pour aller fêter Noël à Bethléem ! » Toutefois, après avoir rapporté les propos du père Mario da Silva en date du 15 décembre, le Patriarcat latin rappelle que les mouvements vers et depuis Israël, la Cisjordanie ou l’étranger sont régis par un régime de permis militaire fondé par l’Etat hébreu en 1991. Un moyen de « contrôler les affaires civiles des Palestiniens, y compris les possibilités de déplacement, de travail et de démarches de santé. »
Ainsi, pour Noël 2018, d’après le curé de la paroisse de la Sainte-Famille à Gaza City, 500 permis ont été approuvés par les autorités militaires israéliennes sur l’ensemble de la petite minorité chrétienne de la Bande de Gaza, catholique comme orthodoxe. Or, déplore le prêtre de l’unique église catholique de l’enclave palestinienne, « jusqu’à présent, nous n’avons reçu qu’environ 250 d’entre eux pour les personnes de plus de 55 ans et de 16 à 35 ans. » Les enfants de moins de 16 ans n’étant pas concernés.
Une pratique qui divise les familles, pointe du doigt le curé de Gaza, d’origine brésilienne et membre de l’Institut de Verbe incarné qui a fêté récemment ses 25 ans de présence en Terre Sainte. Et le père da Silva d’ajouter qu’« Israël applique une politique de séparation des parents et des enfants » en distribuant par exemple un permis au père mais pas à la mère et aux enfants. Dans la pratique, dissuadés, les chanceux qui ont obtenu un permis choisissent au final de rester à Gaza pour fêter Noël en famille. Pour Mgr Giacinto Boulos Marcuzzo, vicaire patriarcal pour Jérusalem et la Palestine, qui s’est exprimé au micro de Vatican News, une telle pratique « est une logique d’occupation que nous ne comprenons pas, ni ne justifions. »
En fait, que ce soit à Noël ou à Pâques, Israël craint que les chrétiens qui disposent d’un permis pour visiter les lieux saints et leurs familles ne reviennent pas après avoir franchi la frontière au terminal d’Erez. Aujourd’hui, sur une population estimée à deux millions de personnes (essentiellement musulmanes) la communauté chrétienne dans la Bande de Gaza, indique le Patriarcat latin, compte quelque 1.100 âmes. Parmi elles, la majorité est grecque-orthodoxe aux côtés de 121 catholiques comme s’est plu à le souligner au micro de Vatican News Mgr Marcuzzo après le baptême d’un des leurs, dimanche dernier.
L’enclave palestinienne de moins de 400 km2 est dirigée par le mouvement islamiste du Hamas depuis 2007 et soumise à un strict blocus terrestre, maritime et aérien par Israël depuis plus de dix ans. Le territoire comptait en 2012, 1550 chrétiens (contre 3000 en 2008) et la paroisse catholique dénombrait, de son côté, 185 fidèles. Restent toujours fidèles au poste quatre communautés catholiques : les prêtres et les sœurs de l’institut du Verbe Incarné, les Missionnaires de la Charité et les Sœurs du Rosaire.
Un Noël sous la lumière
Depuis le blocus en 2007, le Patriarcat latin de Jérusalem a mis un point d’honneur à honorer une tradition qui remonte au début des années 90 de célébrer la messe de Noël à Gaza de manière anticipée comme un signe d’encouragement pour les paroissiens de la Sainte-Famille. C’est d’ailleurs dans ce sens que le dimanche 16 septembre, Mgr Pizzaballa, s’étant rendu pour la troisième fois à Gaza depuis le début de son mandat en tant qu’administrateur apostolique du Patriarcat latin, s’est adressé aux fidèles en ces termes : « Nous savons très bien que vous ne pouvez pas venir à Bethléem avec nous, a-t-il déclaré dans son homélie, c’est pourquoi nous sommes avec vous ici aujourd’hui pour fêter Noël. »
Ce rendez-vous était proche dans le temps de la visite apostolique qu’il venait d’effectuer entre le 1er et 4 novembre dernier. L’Eglise montre son soutien depuis longtemps à la communauté chrétienne locale sur le plan spirituel et pastoral mais aussi matériel et financier. D’ailleurs, dans son message de Noël publié sur le site du Patriarcat latin, Sami El-Yousef, son directeur général, s’est félicité d’avoir vu au cours de cette année la création d’un nouveau jardin d’enfants à Gaza et le lancement d’un projet de création d’emplois destiné aux jeunes chrétiens gazaouis qui a permis d’employer vingt jeunes qui étaient au chômage. En septembre, il s’était aussi réjoui de l’introduction de nouveaux systèmes électriques solaires dans l’école paroissiale et de la construction d’un étage supplémentaire pour l’établissement qui offre davantage de salles de classe et d’autres installations scolaires.
Après des mois de manifestations palestiniennes et de heurts avec les soldats israéliens, qui ont fait craindre un nouveau conflit armé entre le groupe terroriste islamiste palestinien du Hamas, et l’Etat hébreu, l’Egypte et le Qatar sont plus que jamais à la manœuvre pour favoriser la baisse des tensions.
Comme pour éclairer cette réalité, un cadeau lumineux est arrivé un peu en avance sur Noël. Depuis fin octobre, après des années dans le noir et avant que le froid de l’hiver n’arrive, suite à une subvention de 60 millions de dollars du Qatar permettant le fonctionnement des trois turbines de la centrale électrique de Gaza pendant un maximum de six mois, les Gazaouis peuvent profiter en moyenne entre neuf et onze heures de courant par jour, selon un rapport de l’Onu. Alors que ces derniers mois, ils ne disposaient que de quatre heures, au maximum.
Autre signe de détente, le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a autorisé le Qatar à acheminer déjà à deux reprises, deux mensualités de 15 millions de dollars afin de payer les salaires des fonctionnaires dans la bande de Gaza. Au total, ce seront 90 millions de dollars qataris qui seront distribués.
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