Le 14 octobre, le Premier ministre israélien a déclaré que le nombre des chrétiens à Bethléem avait chuté depuis son transfert à l’Autorité palestinienne. Ce que le maire de Bethléem s’est empressé de dénoncer.
« Israël est le seul pays à protéger les droits de l’Homme pour tous. Nous protégeons les droits religieux de tous ». C’est ce qu’a déclaré le Premier ministre israélien, lors du deuxième sommet annuel des médias chrétiens, réunissant à Jérusalem environ 150 journalistes de l’étranger essentiellement évangéliques, organisé par le service de presse du gouvernement, le week-end dernier. « Nous ne protégeons pas seulement les sites chrétiens – nous protégeons aussi les chrétiens. Les chrétiens doivent pouvoir profiter de la liberté de culte, telle qu’ils la désirent, au Moyen-Orient et partout ailleurs », a dit celui qui a présenté dimanche Israël comme l’ultime rempart de la présence chrétienne dans la région. Benjamin Netanyahu a également soutenu qu’ « Israël est le seul pays du Moyen-Orient où la communauté chrétienne prospère et se développe ». Et a dans ce sens critiqué le traitement réservé aux chrétiens par l’Autorité palestinienne.
Pour illustrer ses propos, le leader israélien a déclaré que le nombre de chrétiens dans la ville avait été divisé par quatre depuis son transfert à l’Autorité palestinienne en 1995, conformément aux termes des accords de paix d’Oslo. La communauté chrétienne passant de 80% à 20% de la population. Comprendre selon le leader israélien, que 23 ans plus tard, la population de Bethléem est maintenant à 80% musulmane. « Ce changement, a-t-il expliqué, a eu lieu parce que dans les zones de l’Autorité palestinienne, ainsi que dans tout le Moyen-Orient, les chrétiens sont soumis à des restrictions, des pressions et des persécutions. »
« Une autre tentative israélienne de déformer la réalité de l’occupation israélienne »
Un propos qualifié de « honteux » par le maire de Bethléem, reprochant sévèrement dans un communiqué publié hier, au Premier ministre israélien de se placer en « protecteur du christianisme ». Pour Anton Salman, Benjamin Netanyahu « utilise les chrétiens comme un outil pour ses discours islamophobes. » Et a appelé le Premier ministre à cesser « d’utiliser les chrétiens comme un outil pour blanchir l’occupation. » Le maire a d’ailleurs invité dans son communiqué les dirigeants des Eglises de Jérusalem ainsi que le Saint-Siège « à faire entendre leur voix contre l’utilisation de la religion à des fins politiques. »
L’avocat Anton Salman n’a pas manqué de condamner « une autre tentative israélienne de déformer la réalité de l’occupation israélienne et en particulier les effets de la politique israélienne sur la communauté chrétienne palestinienne depuis 1948. » Voulant remettre les points sur les « i », il a affirmé que « la diminution du pourcentage de chrétiens à Bethléem, ainsi que dans le reste de la Palestine, a été provoquée par la Nakba (ndlr : la catastrophe) de 1948 et se poursuit en raison des plans et de la politique coloniale d’Israël qui ont débuté en 1967. » Et le maire de mentionner également le cas de Jérusalem-Ouest où une grande communauté chrétienne palestinienne a été expulsée par Israël des quartiers d’Ein Karem, de Talbiya, de Qatamon pour ne citer qu’eux. « Sur 31 000 chrétiens en 1948, Jérusalem ne compte aujourd’hui plus que 12 000 chrétiens », fait savoir le maire de Bethléem dans sa déclaration écrite.
Le premier magistrat de la ville palestinienne estime par ailleurs que « si monsieur Netanyahu était préoccupé par la situation des chrétiens palestiniens, en particulier dans la région de Bethléem, il rendrait les 22 000 dounams (ndlr : hectares) de terres de Bethléem annexés illégalement à Israël pour permettre l’expansion de colonies de peuplement. » Et pas seulement, poursuit-il dans le communiqué : « il démantèlerait le mur d’annexion qui sépare Bethléem de Jérusalem pour la première fois en 2000 ans de christianisme et cesserait d’imposer des restrictions aux mouvements des Palestiniens, y compris les milliers de chrétiens palestiniens vivant en exil et dont le retour est impossible. » C’est le cas, rappelle le maire, d’au moins 20 000 chrétiens palestiniens de la région de Bethléem qui vivent actuellement en Jordanie.
Le maire de Bethléem n’en reste pas là et rappelle à la mémoire du Premier ministre israélien qu’il s’est lui-même opposé à ce que l’église de la Nativité soit classée au patrimoine mondial de l’Unesco, qu’il a lui-même soutenu la construction de Jabal Abu Ghneim (Har Homa), « l’une des colonies les plus dommageables qui entourent Bethléem », créant de facto une séparation entre Jérusalem et Bethléem et « rendant impossible la planification de l’avenir de notre ville », signale le maire.
Anton Salman a également fustigé « la politique de harcèlement » notamment fiscal à Jérusalem vu par les Eglises chrétiennes comme une tentative de vider la ville des institutions chrétiennes. Ces dernières avaient fermé en février pendant trois jours le Saint-Sépulcre pour faire entendre leurs voix.