L’ONG Coptic Orphans a fait savoir fin septembre que les Coptes, refusant la violence, ont été nominés pour le prix Nobel de la paix 2018. Ce qui est considéré comme une première pour un groupe ethnico-religieux
Cette année, 216 personnes et 115 organisations ont été nominées pour le prix Nobel de la paix. Parmi les possibles récipiendaires, la communauté copte a été retenue, a indiqué sur sa page Facebook Coptic Orphans, une organisation caritative chrétienne de développement basée aux Etats-Unis. L’ONG relayait le 25 septembre 2018 un article paru la veille sur le site de l’agence de presse américaine PR Newswire. Confirmant la nouvelle. Le Comité Nobel, lui, n’a pas l’habitude de dévoiler les noms des éventuels lauréats.
Comme le rapporte PR Newswire, les Coptes ont été nominés « pour leur refus de riposter contre les persécutions meurtrières et persistantes de la part de gouvernements et de groupes terroristes en Égypte et ailleurs. »
Bien que des organisations telles que la Croix-Rouge américaine et Médecins sans frontières aient déjà reçu ce prix, aucun groupe ethnico-religieux n’a encore figuré parmi les candidats, croit savoir l’agence de presse. Dans ce cas, ce serait une première en 117 ans d’existence du Prix Nobel de la Paix, décerné chaque année par le Comité Nobel norvégien dont les cinq membres sont nommés par le parlement de Norvège. La récompense, de portée internationale, est attribuée à la personnalité ou la communauté « ayant le plus ou le mieux contribué au rapprochement des peuples, à la suppression ou à la réduction des armées permanentes, à la réunion et à la propagation des progrès pour la paix » selon les dernières volontés exprimées dans le testament d’Alfred Nobel, l’inventeur de la dynamite. Le récipiendaire du prix Nobel de la paix sera annoncé le 5 octobre. La remise officielle aura lieu au cours d’une cérémonie en présence du roi et de la reine de Norvège, à Oslo capitale du royaume, le 10 décembre (date anniversaire de la mort d’Alfred Nobel).
Cette nomination qui met à l’honneur les Coptes en tant qu’artisans de paix, même si elle ne débouchera peut-être pas sur la remise du prix Nobel à leur adresse, a le mérite de faire reconnaître à l’échelle internationale les souffrances que peuvent endurer les Coptes, mais aussi de saluer leur persévérance dans la foi et leur identité.
Les chrétiens coptes, qui représenteraient 20 millions d’âmes dans le monde, ont été victimes d’actes de violence et d’oppression au cours des siècles, en particulier en Egypte. Au pays des pyramides, la communauté copte, représente environ 10% de la population égyptienne. Aujourd’hui, les Coptes qui se présentent comme les descendants authentiques des Egyptiens de l’époque des pharaons (le mot copte signifie égyptien) constituent la plus grande population minoritaire chrétienne du Moyen-Orient.
Les Coptes sont souvent la cible de musulmans locaux qui protestent contre la présence de leurs églises dans des villages du pays. Depuis les manifestations du printemps arabe de 2011 et la révolution de 2013, avec l’éviction du président Mohamed Morsi et des Frères musulmans, la pression exercée sur les Coptes s’est accrue. Ils avaient alors soutenu le général Abdel Fattah el-Sisi (actuel président de l’Egypte). Des partisans favorables à Mohamed Morsi avaient notamment riposté en attaquant et en incendiant plus de 80 églises.
Les Coptes sont également dans le collimateur du groupe terroriste Daesh. Faisant partie des infidèles ou qualifiés de « croisés » par le groupe terroriste, les coptes sont aussi directement assimilés à l’Occident dans la propagande de l’Etat Islamique. Le groupe EI s’en prend aux Coptes aussi pour diviser le peuple égyptien.
Pratiquer la coexistence pacifique
Un rapport, cité par PR Newswire, récemment publié par Open Doors, une ONG internationale chrétienne évangélique destinée au soutien des chrétiens persécutés, indique que les chrétiens coptes sont confrontés à « un niveau de persécution sans précédent ». Et pourtant, rappelle PR Newswire, les Coptes « refusent systématiquement de se venger et continuent à pratiquer la coexistence pacifique. » Rien que pour l’année 2018, selon ce rapport, 128 chrétiens coptes ont été exécutés pour leur foi, et plus de 200 ont dû quitter leur maison.
Récemment encore, au centre du pays dans la province de Minya, des villageois égyptiens ont pillé puis incendié les appartements de chrétiens coptes emportant monnaie et bijoux. D’après l’archevêché de Minya, l’attaque a eu lieu au motif que des chrétiens avaient utilisé des maisons ou des salles dans le village pour prier.
2017 a aussi été éprouvante pour les Coptes d’Egypte. L’année s’est terminée par une attaque terroriste dans l’église de Mar Mina au Caire fin décembre où dix personnes ont été tuées. En mai 2017, des extrémistes islamistes ont attaqué un groupe de chrétiens coptes alors qu’ils se rendaient à un monastère au sud du Caire dans la province de Minya, faisant une trentaine de morts. Quarante-neuf chrétiens sont morts dans des attentats à la bombe contre des églises dans les villes de Tanta et d’Alexandrie, le dimanche des Rameaux en 2017. Un prêtre copte avait aussi été assassiné lors d’une attaque au couteau au Caire en octobre 2017.
L’année 2016 s’était clôturée sur une note sanglante. Le 11 décembre, un attentat islamiste avait frappé l’église Saint-Pierre et Saint-Paul au Caire en Egypte. 27 personnes avaient péri. En 2015, 21 coptes ont été décapités par l’État islamique en Libye ; ils ont été reconnus comme martyrs par l’Église orthodoxe copte.
Mais dernièrement, le 24 septembre, le pape Tawadros II, patriarche de l’Eglise copte orthodoxe, a déclaré lors d’une visite aux Etats-Unis que la situation des Coptes s’était légèrement améliorée, faisant référence aux 39 membres coptes de la Chambre des représentants égyptienne. Pour mémoire, également, en août Manal Awad Mikhael a été la première femme copte nommée gouverneure de la province de Damiette en Egypte. Un autre copte, Kamal Gad Sharobim a été nommé gouverneur du gouvernorat de Dakahliya. Preuve que les coptes ne boudent donc pas l’engagement civique et veulent participer au développement de leur pays. Et de la paix.