Et je me dirigerai vers la grotte de la Nativité à l’instar des bergers qui, peut-être simplement par curiosité, ont répondu à l’annonce des anges. Je prendrai la route, suivant l’exemple des mages, eux qui, voyant apparaître une nouvelle étoile, une étoile venant s’ajouter aux milliers d’autres constellant déjà le ciel, surent reconnaître en elle un éclat particulier.
Pourquoi d’ailleurs les mages furent-ils les seuls à remarquer l’étoile naissante ? Il fallait pour cela savoir poser son regard au-delà des choses de la terre. Peut-être les mages étaient-ils les seuls à avoir les yeux orientés vers le ciel afin de se laisser guider par la lumière qui en émanait. Ou peut-être eux seuls réussissaient à comprendre la différence que cette nouvelle étoile produisait. Pour cela, ils avaient dû nécessairement auparavant avoir appris à contempler l’infini.
Voilà donc que ces hommes, venus d’Orient, de la direction du soleil levant, décidèrent de tourner le dos à l’astre du jour, si souvent divinisé par les peuples antiques, d’aller à contre-courant de la logique, pour avancer en pleine nuit, à tâtons, à la recherche d’une autre lumière.
Les bergers aussi avaient levé les yeux, interpellés par les anges au soir de la naissance. Si la chose se reproduisait aujourd’hui, peut-être aurait-on plus tendance à prendre la direction du psychiatre que celle de la crèche. Mais, à l’époque, on croyait aux anges, à cette troupe céleste innombrable chantant la gloire de Dieu. Et on en recevait la paix et la joie qu’ils annonçaient.
Dieu réussira toujours à nous attirer
Je souhaite donc me mettre en route comme ils l’ont fait, “aller jusqu’à Bethléem et voir ce qui est arrivé et que le Seigneur nous a fait connaître” (cf. Lc 2, 15). J’aurais pourtant d’autres choix. Je pourrais suivre l’exemple d’Hérode, rester là où je suis et jouer le jeu de la politique qui, jusqu’à aujourd’hui, fait parfois en sorte que Dieu ne trouve plus d’espace dans notre société pour l’accueillir.
Elle le force à se soustraire aux regards et cherche à le repousser dans les coins les plus pauvres et reculés, sans comprendre que même là, Dieu réussira toujours à nous attirer. Elle pourra bien souhaiter s’en débarrasser, il y aura toujours des gens, riches et pauvres, savants et illettrés, poussés par la curiosité, inspirés par le message de témoins ou même portés par la science, qui se mettront en route afin de se retrouver en présence du Seigneur.
Bien sûr, il y a des voies plus simples et plus rapides que d’autres pour y arriver. Il reste qu’elles ont toutes un point en commun : pour rencontrer l’Emmanuel, celui qui a tant fait pour être “Dieu-avec-nous“, il faut accepter, nous aussi, de faire une partie du chemin. Comme Marie, Joseph, Melchior et les autres, nous devons à notre tour devenir “nous-avec-Dieu“. Lorsque Dieu a parcouru nos routes d’hommes, il a permis qu’à travers elles, nous puissions arriver jusqu’à lui.
C’est ce que firent les bergers ; c’est ce que firent les mages. Ils se retrouvèrent tous ainsi auprès de l’enfant. Ceux qui avaient d’abord levé les yeux vers le ciel, vers les étoiles et vers les anges, baissaient maintenant la tête et posaient leur regard sur la crèche. Et des rois se prosternèrent devant un nouveau-né. À nouveau, cela semble absurde. Nos yeux voient des hommes étrangement vêtus offrir de l’or à un bébé ; ces hommes cependant, ayant appris, dans le silence que la nuit leur offrait, à regarder au-delà des apparences, contemplaient sur cette paille ni plus ni moins que la divinité, et c’est devant elle qu’ils fléchirent les genoux.
Il suffit d’un peu de foi, poussé même par la curiosité, d’un peu de temps de contemplation des merveilles qui nous entourent, et tout prend un sens nouveau. Et tout prend sens : l’enfant, la crèche, les mages et les bergers, l’adoration, la méditation et la prière, simplement parce que, comme ces rois venus d’Orient, nous aurons compris que plus important encore que de savoir où nous sommes, en levant notre regard, nous pouvons voir où nous allons. τ
Dernière mise à jour: 21/01/2024 23:52