La Bibliothèque nationale d’Israël aspire à répondre aux besoins de son pays. Avec une forte spécialisation en judaïsme et histoire du peuple juif, elle rassemble malgré son jeune âge des collections de renommée mondiale. Retour sur l’histoire de ce lieu avec Milka Levy-Rubin, conservatrice en chef.
La Bibliothèque nationale d’Israël, située sur le campus de l’Université hébraïque de Jérusalem, est fière d’être une institution culturelle dédiée au judaïsme. Milka Levy-Rubin, conservatrice en chef du département des sciences humaines, nous accueille chaleureusement dans son bureau. “Pour vous donner une comparaison : les franciscains se voient comme les gardiens de la Terre Sainte, de la même façon, nous nous voyons comme les gardiens de la culture juive”, débute-t-elle.
Professeur à l’Université hébraïque, Milka explique pourquoi la Bibliothèque nationale collecte des textes partout dans le monde. “C’est la culture qui rassemble la communauté mondiale juive, il est nécessaire d’avoir un lieu qui célèbre et représente ce riche héritage”.
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Indissociable du mouvement sioniste, l’idée de construire une bibliothèque du peuple juif est née en 1882 avec l’arrivée de nombreux juifs en Terre Sainte. Ahad Ha-Am, écrivain de la fin du XIXe siècle a été l’une des figures de proue de ce sionisme culturel. Avant même la construction d’un État, il appelait de ses vœux une renaissance culturelle à même de faire rayonner cette identité communautaire retrouvée.
Passage au collège Terra Sancta
C’est dans le centre ville de Jérusalem sous le nom de Bibliothèque Midrash Abarbanel qu’elle ouvrit ses portes en 1892. Cette petite bibliothèque comptait alors 20 000 ouvrages grâce à la donation de la collection personnelle du docteur Hasanovic. En 1929, sous la direction de Samuel Hugo Bergman, la bibliothèque s’accrut à une vitesse impressionnante. Ce professeur de philosophie, pragois, fit le choix d’ouvrir l’institution à des domaines autres que le judaïsme. La bibliothèque devint alors partie intégrante de l’Université hébraïque.
Elle déménagea au Mont Scopus en 1930 mais pour une courte durée, car, à la création de l’État en 1948, le Mont Scopus devint inaccessible et la bibliothèque quitta les lieux. Elle trouva successivement refuge dans de nombreux bâtiments de Jérusalem et même près de la Grande synagogue au collège Terra Sancta de la Custodie, lui-même vidé de ses élèves qui avaient trouvé asile en vieille ville. En 1960, la Bibliothèque nationale d’Israël s’ancrait à Givat Ram, sur le campus actuel de l’université.
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Aujourd’hui, la bibliothèque compte des millions d’ouvrages. Elle est propriétaire de nombreuses collections prestigieuses dans lesquelles se trouvent livres, manuscrits, cartes géographiques et archives personnelles. Son but n’a pas changé : “Nous aspirons à être une bibliothèque qui réponde et serve les besoins de tout le pays”, redit encore Milka Levy-Rubin.
La bibliothèque se compose de quatre collections : la plus importante est la collection Judaïca ; vient ensuite la collection Israël (journaux, périodiques, cartes, affiches en lien avec la législation de l’État), puis la collection Islam et Moyen-Orient (théologie, philosophie, mysticisme en particulier arabes, persans, turcs et ourdou) ; enfin la collection des sciences humaines regroupant la philosophie, l’histoire du christianisme, la médecine et la technologie.
Textes des trois religions
« Une place importante est donnée à l’étude des textes chrétiens et musulmans : “Les trois religions sont liées les unes aux autres”, commente la conservatrice. Ainsi, on retrouve nombre de Corans, Bibles et autres textes religieux tels des Livres d’heures ou la Peshitta, la plus ancienne traduction syriaque de l’Ancien et du Nouveau Testament (ce dernier ayant été écrit en grec).
Dans leur collection impressionnante de manuscrits et d’archives personnelles, on découvre aussi les textes de célébrités : Isaac Newton, figure emblématique des sciences, Naomi Shemer, auteur compositeur israélienne importante du XXIe siècle ou encore Samuel Josef Agnon, premier écrivain hébraïque à avoir remporté le prix Nobel de littérature en 1966. Soucieuse de vulgarisation et de l’accessibilité de son patrimoine, la Bibliothèque s’est lancée dans la numérisation de nombreux manuscrits.
Des activités éducatives, des conférences sont aussi proposées au public. La collaboration avec plusieurs institutions culturelles internationales est fructueuse. De grandes expositions sont programmées comme en automne 2014 : “Rêves et diplomatie en Terre Sainte”, une fenêtre sur l’implication américaine dans la région à travers la vie des consuls et autres agents diplomatiques qui ont servi en Israël. Et devinez quoi. Sur les rayonnages de la Bibliothèque nationale on trouve aussi Terre Sainte Magazine ! La gloire !
Dernière mise à jour: 21/01/2024 23:52