Actualité et archéologie du Moyen-Orient et du monde de la Bible

Le pape François en Égypte

Frans Bouwen, m.afr.
30 juillet 2017
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Le pape François et le patriarche copte orthodoxe Tawadros II ont scellé dans un document commun leur volonté d’avancer vers la communion.

Une nouvelle fois le pape est allé à la rencontre. Le père Bouwen explique le sens de ce qui devient la “marque de fabrique” du Serviteur des serviteurs.


Le terme “prophétique” est souvent utilisé à temps et à contretemps, et s’en trouve dévalué. Pourtant, je n’hésite pas à l’employer pour qualifier la visite que le pape François a effectuée en Égypte, en avril dernier. Elle a été prophétique dans les deux sens du terme : symbole d’un message et d’une mission, et gage de l’espérance dont le geste est porteur. Cela dans deux domaines : les relations œcuméniques avec l’Église copte orthodoxe et les relations islamo-chrétiennes.
Depuis la venue du patriarche copte orthodoxe Tawadros II à Rome en 2013, le pape François cherchait à lui rendre la visite. De son côté Tawadros désirait ardemment rendre à François l’hospitalité qu’il avait reçue. Les nombreux messages que les deux ont échangés lors des attentats contre les coptes ont encore approfondi les liens fraternels entre eux.
En même temps, les violences dont les chrétiens sont actuellement les victimes au Moyen-Orient et leur avenir tiennent très à cœur au pape. Il dénonce sans cesse toute violence au nom de la religion et fait appel aux valeurs les plus positives de l’islam. Ces préoccupations étaient déjà au cœur de sa rencontre avec le grand cheikh de l’Université Al Azhar en mai 2016. Ce dernier l’avait alors invité au Caire.

Le pape François attache une importance prioritaire à la rencontre personnelle, à la proximité, et pas seulement par les paroles mais par les gestes. Il aime évoquer l’image de marcher ensemble, en route vers le but recherché. Il l’applique d’abord à la cause de l’unité des chrétiens : “C’est en marchant ensemble que nous ferons l’unité”, aime-t-il dire. Il a voulu montrer aux coptes d’Égypte qu’il est proche d’eux, dans les difficultés qu’ils rencontrent et les violences qu’ils subissent, parce qu’il est proche d’eux dans la même foi au Christ jusqu’au don de la vie. Cette proximité se fonde sur l’unique baptême au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit. Il convient donc de se réjouir que leur rencontre au Caire ait permis au pape François et au patriarche Tawadros d’affirmer ensemble : “Dans le même esprit et d’un même cœur, nous chercherons sincèrement à ne plus répéter le baptême qui a été administré dans nos Églises respectives pour toute personne qui souhaite rejoindre l’une ou l’autre.” La répétition du baptême dans le cas d’un mariage entre un(e) catholique et un(e) copte orthodoxe est une expérience très douloureuse pour les catholiques. D’aucuns auraient souhaité que la visite du pape permette de mettre fin définitivement à cette pratique. Cela n’a pas pu se faire encore, mais l’engagement solennel pris par les deux chefs d’Églises est très significatif. Ils se disent décidés à tout faire pour que cela devienne possible. Il n’y a plus de retour en arrière envisageable. Si on veut faire l’unité en marchant ensemble, il est important de s’adapter au pas des uns et des autres, sinon la marche risque de créer de nouvelles divisions. En attendant nous vivons plus intensément ce que nous avons déjà en commun.

La même dynamique inspire le pape dans son attitude à l’égard des musulmans. Les relations islamo-chrétiennes se trouvent actuellement devant de grands défis. Dialogues et études communes sont grandement nécessaires, mais il convient de commencer par faire un bout de chemin ensemble. Par sa visite aux musulmans d’Égypte, le pape nous encourage à aller à la rencontre des musulmans qui rejettent eux aussi la violence au nom de Dieu, à les soutenir dans leurs initiatives. Alors certains préjugés tomberont peu à peu et chrétiens et musulmans grandiront dans la connaissance mutuelle. Certes, les musulmans auront grand besoin de faire une nouvelle interprétation des textes sacrés qui sont utilisés pour donner une apparence de justification à la violence, mais ce sera une démarche longue et il n’appartient pas aux chrétiens de forcer le pas. “Ensemble, redisons un ‘non’ fort et clair à toute forme de violence, de vengeance et de haine commises au nom de la religion ou au nom de Dieu. Disons ensemble : plus on grandit dans la foi en Dieu, plus on grandit dans l’amour du prochain”, a déclaré François au Caire. Certains spécialistes de géopolitique peuvent rester sceptiques quant au résultat de cette démarche, mais le pape croit qu’il y a une autre dimension à la réalité humaine, celle de la foi qui s’ouvre à l’action de Dieu, désireux et capable de convertir les cœurs.
La visite du pape François en Égypte s’inscrit dans une série de démarches à la rencontre : des réfugiés, des orthodoxes, des sinistrés, des luthériens en Suède etc. Toujours François se met en route, exprimant par là son désir de la rencontre et sa foi profonde que toute démarche humaine vers les autres sera bénie par Dieu, lui qui, le premier, s’est rendu proche de nous en Jésus et a ainsi donné une signification nouvelle à toute rencontre humaine. ♦

Dernière mise à jour: 24/01/2024 11:00