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Emile Shoufani : une voix israélienne chrétienne engagée pour le dialogue s’est tue

Rédaction
18 février 2024
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Le père Emile Shoufani le 15 octobre 2023 devant les caméras de la télévision arabe israélienne Ehna. Capture d'écran.

Emile Shoufani, archimandrite grec-catholique à Nazareth est décédé dimanche 18 février au matin.
Avec lui s’éteint une des voix qui a résolument appelé à la réconciliation entre arabes et juifs en Israël.


« Je ne suis pas palestinien d’Israël ou de 48 ou de je ne sais quoi d’autre. Je suis israélien. », insistait le père Emile Shoufani devant la journaliste de Terre Sainte Magazine, Claire Riobé, venue l’interviewer chez lui à l’hiver 2019.

Il le disait avec douceur mais avec force de conviction. Le père Emile Shoufani, née à Nazareth en  Palestine mandatiare en 1947, s’était très bien accommodé de la nationalité israélienne qu’il avait reçu dans son enfance au même titre que tous les Palestiniens résidant dans l’Etat d’Israël à sa création en 1948.

Lire aussi >> Émile Shoufani : « Le vrai sionisme est mort en 1948 »

Il a une vingtaine d’années quand, étudiant en France, il découvre l’horreur de l’holocauste et cherche à rencontrer des rescapés des camps pour entendre leurs témoignages. Cette découverte sera déterminante pour lui dans la compréhension des ressorts de la création de l’Etat hébreu et dans son parcours personnel. « J’ai compris qu’on ne peut pas entrer en dialogue avec le peuple juif si on ne connaît pas cette histoire-là ».
Quelques années plus tard, dans l’école grecque-catholique Saint-Joseph de Nazareth, celui qui s’était engagé dans l’enseignement par conviction inscrivit au programme l’enseignement de la shoah. « C’était la première fois en Israël que des élèves arabes, musulmans et chrétiens, découvraient cette réalité. » Chaque année, il emmenait des classes au mémorial de Yad vaShem.

Durant près de 50 ans, il n’aura cessé d’être le chantre du dialogue entre juifs et arabes en Israël, allant jusqu’à organiser, après la seconde intifada qu’il jugeait dévastatrice, un groupe mixte pour une visite d’Auschwitz.

Son action inlassable avait été reconnue. En Israël, il fut fait Docteur Honoris causa de l’Université hébraïque de Jérusalem, de même en Belgique par l’Université catholique de Louvain après son voyage à Auschwitz-Birkenau. En 2003, il reçut le prix de l’Unesco de “l’éducation pour la paix” et en 2014 au Collège des Bernardins le prix de “l’Amitié judéo-chrétienne de France”.

Emile Shoufani en 2022 à Nazareth ©Claire Duhamel

Son engagement pour le dialogue n’avait pas failli ces dernières années, mais comme israélien, il entendait pouvoir critiquer l’action politique de Benjamin Netanyahu sans que cette critique soit taxée d’antisémitisme ou de d’antisionisme comme il s’en expliquait dans un dossier consacré à ce sujet dans Terre Sainte Magazine en janvier 2020.

Usé par la maladie

Sa dernière apparition télévisée eut lieu le 15 octobre dernier sur la chaine arabe israélienne Ehna. En dépit de la date, il n’était pas interviewé au sujet des massacres du 7 octobre et des conséquences tragiques en Israël et à Gaza ou sur les relations entre juifs et non juifs, mais sur ce qu’il estimait être la guérison physique qu’il avait connue à Lourdes. Il disait s’être rendu quelques mois plus tôt dans le sanctuaire mariale des Pyrénées et racontait comment un homme « qu’il croyait reconnaître sans pouvoir le nommer » lui avait donné de l’eau de la grotte à boire alors que lui-même était en fauteuil assistant à un office au milieu des autres malades. Plus tard, il revit l’homme qui s’adressa à lui en disant : « Dans un mois tu seras guéri » et de fait, alors qu’il avait connu plusieurs vertiges qui lui valaient de se déplacer dorénavant en fauteuil roulant, c’est sur ses jambes qu’il avait rejoint le plateau de télévision. Il disait même se dispenser maintenant des dialyses qu’il devait faire tous les six mois tandis qu’une maladie des reins était à l’origine de sa faiblesse ces dernières années.

A la télévision, il apparaissait pourtant bien changé, amaigri et vieilli. Il est décédé dimanche 18 février au matin à Nazareth où il sera inhumé lundi après-midi.


Retrouvez le père Shoufani dans une interview donnée à France Culture en 2020 à l’émission Chrétiens d’orient : cliquez ici.

Et une archive vidéo du Jour du Seigneur datant de 2008 ci-dessous.

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