Comment distinguer le désir de prendre du temps pour prier et se recueillir, de celui de découvrir et de se cultiver ? La nuance entre pèlerinage et tourisme religieux, souvent floue, a récemment été clarifiée par l’Assemblée des Ordinaires catholiques de Terre Sainte (AOCTS) pour comprendre leurs différences. La vocation des programmes n’étant pas la même.
Voyager en Terre Sainte, c’est inévitablement aller à la rencontre d’une culture et d’une société unique qui ne laisse pas indifférent. C’est accepter de se laisser emporter par une histoire millénaire, modelée par les trois grandes religions monothéistes. Ici, le voyageur quitte sa maison, son quotidien, ses habitudes pour embrasser, quelques jours, une terre qui le marquera. Chaque année on compte en millions le nombre de visiteurs venus sillonner le pays de Jésus. Parmi eux, bon nombre de chrétiens. De Bethléem à Jérusalem, en passant par le désert de Judée, le Jourdain ou la Galilée, ces fidèles cherchent à suivre les pas du Christ. Parfois autant dans une démarche culturelle que spirituelle. Mais entre pèlerinage et tourisme religieux, la frontière est souvent mince. Les deux types de voyage répondent à des vocations différentes et des impératifs administratifs distincts.
Un texte explicatif
Pour faire cette différence, l’AOCTS a décidé de définir clairement les deux notions dans un document rédigé par la Commission épiscopale pour les pèlerinages. Elle a rappelé avant tout que, derrière l’appellation de “Terre Sainte”, on comprenait Jérusalem, Israël, la Palestine, Chypre et la Jordanie. Ces pays ou territoires offrant aux pèlerins la possibilité de relire l’histoire du salut, Bible en main.
D’après elle, et en se référant au droit canon, le pèlerinage se définit comme “Un acte de culte où la dimension religieuse et culturelle prime sur toute autre considération. Cette dimension se manifeste lors de la visite d’un sanctuaire lié à la célébration d’un mystère de la foi, ou en s’arrêtant sur un lieu lié à un passage de l’Écriture”. Ainsi, seul un consacré – “prêtre, diacre, religieux ou religieuse”, spécifie le document – peut animer un pèlerinage.
A contrario le tourisme religieux peut permettre de faire escale dans des lieux saints, propres ou non à la chrétienté. Son “but principal, poursuit la commission, est avant tout socioculturel, même s’il n’exclut pas une célébration liturgique et la possibilité d’une catéchèse”.
On peut compter au milieu des participants à un séjour touristique des consacrés (religieux et prêtres), mais la finalité n’est pas la spiritualité et le culte, même lors de visites d’églises.
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Néanmoins n’est-on pas forcément un peu touriste lorsque l’on pérégrine ? Et selon sa sensibilité, ne devient-on pas un peu pèlerin en visitant les lieux saints ? Il faut comprendre que l’on peut effectivement faire du tourisme religieux pendant un pèlerinage lors des déplacements d’un lieu à un autre. Entre les temps spirituels le prêtre ou un guide avec licence est alors amené à parler du territoire, à expliquer son histoire, à le mettre en valeur. Selon les lieux et selon les cœurs, difficile de savoir ce qui relève de la foi ou du culturel. Dans les faits et d’après la Commission des Pèlerinages, un pèlerinage en Terre Sainte pour des chrétiens devrait “éviter la visite des lieux historiques où la prière n’est pas autorisée, comme les musées, Yad Vashem, le Kotel, les parcs nationaux”.
Derrière cette notion restreinte de pèlerinage, il y a le contexte des tensions existant entre le ministère du Tourisme israélien qui veut que les guides officiels soient privilégiés pour accompagner les groupes, et la Commission qui devant le même ministère est autorisée à délivrer des cartes temporaires, dites “cartes vertes”, permettant à des consacrés de guider officiellement dans le pays.
A certaines périodes de l’année, les guides officiels ne suffisent pas et qu’un pèlerinage puisse être guidé par un consacré est un droit que l’Église entend conserver.
Les conditions d’obtention de la carte verte sont devenues drastiques et un guide à carte verte n’a pas le droit d’être rémunéré. Cela dit un pèlerinage peut très bien être animé spirituellement par un consacré et bénéficier des compétences d’un guide professionnel…
Quoi qu’il en soit, si la distinction entre pèlerinage et tourisme religieux se fait d’un point de vue législatif sur le contenu et les lieux traversés, d’un point de vue personnel il convient à chacun de discerner la démarche de conversion intérieure de la finalité culturelle.♦
Le texte intégral
Le texte de la commission est disponible dans son intégralité en ligne à cette adresse : bit.ly/PelerinageAOCTS
Dernière mise à jour: 06/03/2024 13:42