A Rome mi-avril, le Grand Magistère de l’Ordre équestre du Saint-Sépulcre a fait le point sur ses projets en Terre Sainte. Un nouveau cap se dessine, a-t-il indiqué le 2 mai. Avec en vue l’Assemblée Générale de novembre.
Neuf mois après avoir pris officiellement ses fonctions, le Gouverneur général de l’Ordre équestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem (OESSJ) souhaite « donner une nouvelle orientation » aux projets que l’institution de droit pontificale mène au service de la Terre Sainte. Projets qui sont suivis par le Grand Magistère, pièce centrale du gouvernement de l’Ordre. A ce titre, il coordonne l’aide globale envoyée au diocèse du Patriarcat Latin de Jérusalem qui compte 90 000 fidèles catholiques (et près de 70 paroisses) de rite latin, en Palestine, Israël, Jordanie et à Chypre. Le Grand Magistère se réunit deux fois par ans. La réunion dite « de printemps » vient d’avoir lieu (les 17 et 18 avril), a rapporté dans une communication le site officiel de l’OESSJ, le 2 mai dernier. Le but ? Passer en revue l’année 2017 sous le prisme de la situation en Terre Sainte, des activités de l’Ordre et des projets qu’il finance, qu’ils soient terminés ou en cours, notamment en ce qui concerne le séminaire, les écoles catholiques et les paroisses.
Sur le plan des comptes pour 2017, l’Ordre affirme que « les contributions envoyées en Terre Sainte se maintiennent au même niveau que l’année précédente. » Le site de l’Ordre rapporte que « le budget d’ensemble de l’aide procurée à la Terre Sainte avoisine les 10 millions d’euros chaque année. » Cela dit, en 2017, les dons reçus au Grand Magistère ont accusé une baisse d’1,5 million d’euros s’élevant à 14,5 millions d’euros contre 16,3 millions en 2016. Ce qui avait d’ailleurs été un record. Les Américains, les Allemands et les Italiens étant les plus généreux. Par ailleurs, il a été annoncé que la dette du Patriarcat (notamment liée à l’Université de Madaba) commencera à être remboursée en 2020. A cet effet, un prêt a été souscrit par la Fondation vaticane Saint-Jean-Baptiste auprès d’une banque suisse, avec des garanties données par la Secrétairerie d’Etat du Saint-Siège. D’autre part, « un audit réalisé par la société Deloitte est un point d’appui essentiel en vue de nouvelles procédures opérationnelles et professionnelles qui faciliteront la maîtrise du déficit », indique La Croix de Jérusalem, la revue annuelle du Grand Magistère mise en ligne la semaine dernière.
La réunion de printemps, outre les sujets financiers, a eu cette particularité cette année, de s’inscrire dans la perspective de l’Assemblée générale – nommée « Consulta » – que tiendra l’Ordre à l’automne prochain du 13 au 16 novembre à Rome. Cet événement quinquennal est capital dans la vie de l’institution, car cela lui permettra de « mieux se définir » et de « mieux déployer son message et sa mission », selon les mots du Grand Maître de l’Ordre, le cardinal Edwin O’Brien, dans un éditorial signé dans La Croix de Jérusalem. Dans l’optique de la Consulta qui aura lieu en novembre, de nouveaux statuts sont d’ailleurs prévus pour adapter l’action et les projets de l’Ordre.
« Renforcer l’existant »
L’enjeu de cette Assemblée générale n’aura échappé à personne. Et déjà la réunion d’avril a pu donner un aperçu des nouvelles perspectives qui attendent l’institution. De prime abord, le Gouverneur général de l’Ordre, Leonardo Visconti di Modrone, a annoncé que, sur le plan des projets soutenus par l’Ordre, « la formation humaine sera privilégiée sur les constructions de bâtiments, en particulier à travers le soutien au réseau d’écoles catholiques du Patriarcat. » Suivant en clair, le souhait du diocèse « de renforcer l’existant plutôt que de créer de nouvelles structures », comme le rapporte La Croix de Jérusalem. En écho, Mgr Pierbattista Pizzaballa, l’Administrateur apostolique du Patriarcat latin, a souligné sa volonté d’une « meilleure coordination des écoles », grâce à la création d’un « bureau central », insistant sur l’importance de la catéchèse. « Nous ne sommes pas une ONG, a-t-il déclaré, ce qui nous importe est d’ordre avant tout pastoral, il s’agit de former chrétiennement les générations futures ».
A noter que le pôle Education est un lourd poste financier qui représente les deux tiers du budget du diocèse du Patriarcat latin en charge de 41 écoles et 34 crèches qui comptent près de 20 000 élèves et 1 500 salariés. Concernant les traitements du personnel enseignant des écoles du diocèse de Jérusalem, « le Grand Magistère a envoyé 800 000 dollars au Patriarcat Latin en 2017 pour faire face à ces nécessités et afin d’assurer un enseignement catholique de qualité. », informe La Croix de Jérusalem. En 2018, l’effort sera renforcé car il faut compter les retraites des enseignants dont le Patriarcat a été l’employeur.
Une vingtaine de petits projets
Il y a presqu’un an, au début de son mandat, Leonardo di Visconti di Modrone, le nouveau gouverneur de l’Ordre, avait appelé tous les membres de l’institution à « renforcer leur participation effective à la résolution des problèmes en Terre Sainte, spécialement en allant le plus souvent possible en pèlerinage sur place, au contact des personnes. » Dans le fil de cette idée, au nom de la culture de la rencontre, l’OESSJ priorisera – et ce dès 2018 – ce qu’il appelle « les petits projets ». Ces derniers correspondent au total à pas moins de 300 000 euros et ont vocation à privilégier la proximité humaine entre les membres de l’Ordre et les catholiques de Terre Sainte. Il y en aurait une vingtaine. Ils devraient permettre également de « diversifier la motivation des Chevaliers et Dames », les membres admis dans l’Ordre.
Cela n’empêche évidement pas le soutien et le développement de plus grands projets aux coûts plus conséquents comme par exemple la remise aux normes d’une école maternelle à Hashimi en Jordanie (701 000 dollars), l’agrandissement de l’école et du presbytère de Jaffa de Nazareth en Israël (1 700 000 dollars) ou encore la construction d’une église à Jubeiha en Jordanie dont les travaux avoisinent le million de dollars.
Communication et recrutement de nouveaux membres
L’autre gros dossier concerne le poste communication. Et ce, pour deux motifs principaux. D’une part, pour favoriser le recrutement de membres plus jeunes au sein de l’institution. Si le nombre de membres reste « stable », le nombre de décès a augmenté de 12% en 2017 par rapport à 2016. D’autre part, pour faire entendre la voix de l’Ordre sur la scène publique et faire découvrir ses missions sur le terrain. Le Gouverneur général de l’Ordre avait déjà fait remarquer en juin 2017 que l’opinion publique et le monde politique ne connaissaient pas suffisamment l’action concrète des Chevaliers et Dames du Saint-Sépulcre. Ceci s’explique sans doute par ce que l’ordre fonctionne principalement avec les dons de ses membres plutôt que par des appels aux dons de l’extérieur. L’ancien diplomate avait alors déclaré vouloir voir aussi dans la communication un vecteur qui permettrait à l’Ordre de « participer à des initiatives en faveur de la justice et de la paix » au Moyen-Orient.
D’ores et déjà, quelques changements se dessinent. La Croix de Jérusalem, l’emblématique revue annuelle du Grand Magistère, éditée en cinq langues, va prochainement se muer en « un instrument de préparation au pèlerinage en Terre Sainte, se projetant davantage vers l’année suivante, sans regards en arrière », a averti le chancelier de l’Ordre, Alfredo Bastianelli, dans ce qui est donc le dernier numéro de La Croix de Jérusalem paru la semaine dernière, connue jusqu’à présent pour son angle rétrospectif. Ce dernier sera traité par le site officiel de l’Ordre (www.oessh.va) et sa newsletter trimestrielle.
« Tous ces sujets et le rôle des Lieutenants (ndlr : à la tête des délégations nationales de l’Ordre) seront approfondis lors de l’assemblée générale de l’Ordre », rapporte le site officiel de l’OESSJ. Ainsi sont attendus à Rome en novembre les représentants de l’Ordre venus du monde entier. L’Ordre majoritairement laïc est ainsi composé d’une soixantaine de Lieutenances réparties aux quatre coins du globe dans presque 40 pays. 30 000 Chevaliers et Dames en font partie. Une réflexion sur le rôle des religieux et leur accompagnement spirituel pour les membres laïcs de l’Ordre est d’ailleurs engagée sous l’impulsion du cardinal Edwin O’Brien. Là encore, un écho au désir du Gouverneur général, exprimé au moment de sa nomination en juin dernier, de « privilégier l’engagement intérieur, spirituel, afin d’enraciner en profondeur notre combat pour le dialogue et la justice sociale en Terre Sainte. »
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