En route pour l’égalité homme-femme au Mur Occidental?
Les travaux de création d'une zone mixte au Mur Occidental ont commencé cette semaine à Jérusalem. B. Netanyahu avait pourtant annoncé le gel du projet en 2017. Les Juifs libéraux, non prévenus, sont réservés.
(Jérusalem) – Par surprise. Les travaux en vue de la création d’une zone mixte de prière au Mur Occidental de l’antique Temple de Jérusalem ont commencé cette semaine. La chaîne de télévision i24news s’en est fait l’écho mardi 6 février 2018. Cela fait plusieurs années que le sujet divise, et connaît de nombreux rebondissements. Au départ revendication de mouvements juifs libéraux, notamment des « Femmes du Mur », ce plan de rénovation coûtera, selon le média israélien, 19 millions de shekel. Soit environ 4,4 millions d’euros. Cet espace mixte, du nom de « Hazrat Israel » (qui signifie en hébreu « le retour d’Israël »), prendra place sous l’arche Robinson, sur la partie la plus méridionale du Mur des Lamentations. Les travaux préparatoires sont supervisés par l’Autorité Israélienne des Antiquités, car cet espace surplombe un site archéologique, le parc Davidson.
Accueil mitigé
L’accueil de cette annonce est plutôt mitigé chez les juifs libéraux qui avaient négocié un accord en 2016 avec le gouvernement israélien. Il prévoyait de doubler l’espace réservé à la prière, en l’étendant jusqu’à l’arche Robinson, l’accès le plus méridional du Mur Occidental à l’esplanade du Temple à l’époque du roi Hérode. Cela devait permettre de créer un troisième espace de prière, mixte et non-orthodoxe. Mais en gelant ce projet en juin 2017, le Premier ministre israélien a renoncé à l’établissement d’une entrée conjointe pour les hommes et les femmes sur le lieu de prière. En parallèle, Benjamin Netanyahu avait annoncé vouloir tout de même continuer la construction d’une plateforme permanente pour les groupes mixtes. Ce que confirment les travaux débutés en début de semaine.
Un porte-parole du mouvement réformé a donc, sans surprise, présenté au journal Times of Israël un avis critique : « L’Etat a commencé le travail sur la section sans coordination et sans nous informer de ce qui sera construit. Nous n’avons entendu parler de cette construction que par hasard ». De même, les « Femmes du Mur » indiquent attendre la décision de la Cour suprême israélienne, suite à un recours déposé par plusieurs mouvements libéraux auxquels elles sont associées quant au partage et à l’égal accès de tous au Mur. Les juifs libéraux n’entendent donc pas renoncer au plan de 2016. A contrario, le chef du mouvement conservateur « Massorti », le Dr Yizhar Hess, est lui plus positif : « Nous ne serons pas en mesure de consacrer le produit fini, mais nous pouvons très certainement nous réjouir de ce qu’il y ait quelque chose de fait et c’est une donnée que je ne minimise pas ».
Un vieux serpent de mer
En effet, la question de la création d’un tel espace est un vieux serpent de mer de la politique israélienne. En avril 2013, cinq féministes religieuses juives de l’association « Femmes du Mur » sont arrêtées pour avoir prié au Mur des Lamentations avec des phylactères (bandes de cuir avec une petite boîte renfermant des extraits de la Torah, portées sur la tête et le bras droit) et le châle de prière, le tallith, deux instruments liturgiques réservés aux hommes selon les Juifs ultra-orthodoxes. Pour mettre fin au conflit, Natan Sharansky, président de l’Agence Juive, présente quelques jours plus tard à Benjamin Netanyahou un plan de sortie de crise. Le projet est alors accueilli positivement par toutes les parties, des libéraux aux conservateurs. Si le gouvernement signe le 31 janvier 2016 l’accord qui acte officiellement ce plan, il est remis en cause rapidement. La pression des Juifs ultra-orthodoxes, qui jugent la manière de prier des libéraux hérétique, compromet en effet la mise en place du projet. Le poids politique de ces derniers, bien qu’ils ne représentent qu’une faible part des élus au Parlement, la Knesset, suffit à renverser la balance. Fin mars 2016, c’est le Premier Ministre Benjamin Netanyahu qui émet des réserves. Si bien que le 26 juin 2017, le projet est officiellement retiré.
Le Mur des Lamentations, appelé Kotel, est le lieu le plus saint du judaïsme. Actuellement, le site est divisé en deux, par une cloison. La partie Nord est réservée aux hommes. La partie Sud, moitié moins large, est à la disposition des femmes.