Les fortes pluies qui se sont abattues sur la région ont permis à un habitant de Gaza de découvrir un cimetière qui pourrait dater de l’époque romaine ou byzantine. Une découverte qu’a rapportée l’AFP le 27 janvier 2018.
Le 26 janvier, un Palestinien de la bande de Gaza est descendu dans son jardin. Non pour y cueillir du romarin mais pour observer la pluie ruisseler vers une cavité de son terrain inondé. Et bien lui en a pris car les précipitations diluviennes de ces derniers jours ont permis de mettre à jour une découverte archéologique pour le moins inattendue. Après avoir déplacé une lourde pierre, rapporte l’Agence France Presse, Abdel Karim al-Kafarnah (24 ans) a trouvé dans la boue et sous ses pieds, des marches qui l’ont conduit quatre mètres plus bas à un petit complexe funéraire antique duquel une odeur pestilentielle s’est répandue. Déclarant avoir vu neuf tombes, le jeune Gaziote a affirmé que certaines d’entre elles contenaient un amoncellement d’os, regroupant apparemment plus d’un corps chacun. Il a également déclaré avoir retrouvé des morceaux de poteries en argile dont un sceau et des lampes votives.
La découverte a eu lieu à Beit Hanoun, au nord-est de la bande de Gaza, une ville de 35 000 habitants qui a subi des bombardements intensifs lors de l’opération militaire « Bordure protectrice » de l’été 2014 menée par l’Etat d’Israël contre le Hamas et le Jihad islamique palestinien. La maison familiale des al-Kafarnah a été détruite lors de ce conflit qui aura duré sept semaines, laissant de larges cratères dans le jardin et permettant fortuitement cette découverte archéologique de taille.
Des fouilles approfondies nécessaires
Selon un archéologue de Gaza, Ayman Hassouna, les sépultures pourraient remonter à l’époque romaine, il y a 2 000 ans, lorsque le territoire faisait partie du vaste Empire romain. « La méthode utilisée pour la sépulture et pour creuser les tombes dans ce cimetière date de l’époque romaine ou du début de la période byzantine » (du Ve au VIIe siècle après J.-C.), estime-t-il auprès de l’AFP.
Cependant, des fouilles archéologiques approfondies seront nécessaires pour déterminer l’exacte ancienneté du site, sa vocation et l’origine des habitants de la région.
Car l’archéologie funéraire, qui s’attache au monde des morts, nous renseigne aussi sur le monde des vivants en étudiant les espaces mortuaires (leur localisation, leur organisation), l’architecture des tombes, leur décoration, les objets qu’on y retrouve, les ossements (et leur positionnement) mais aussi les traditions funéraires qui les enveloppent. Tout cela permet aussi de comprendre la biologie des corps (l’identité des morts quelque fois, leur sexe, leur âge, leurs pathologies, parfois même leur régime alimentaire). Les études funéraires nous en apprennent beaucoup sur la vie d’un individu et souvent sur l’évolution de toute une société, avec ses us et coutumes.
Mais déjà, Jodi Magness, une archéologue de l’université américaine de la Caroline du Nord, citée par l’agence de presse française affirme que ce genre de tombes était relativement commun dans les environs de Jérusalem (ndlr : Beit Hanoun se trouve à environ 100 km au sud-ouest de la ville sainte) entre le premier siècle avant et après notre ère et ensuite entre 300 et 500 après J.-C. « Ce type de tombes est typiquement familial, ou parfois de plus vastes tombes pouvaient être divisées entre plusieurs familles », poursuit l’archéologue.
Un patrimoine en souffrance
Quand Gaza et son evironnement devinrent Romains, ils furent rattachés à la province Romaine de Syrie. Au Ier siècle après J.-C., Gaza est connue comme le point de départ des caravanes d’encens des Nabatéens. Vers 250 le Christianisme commença à s’y répandre. Gaza resta prospère sous le règne des Byzantins. En 618 et 629 elle fut prise et occupée par les Perses Sassanides. Elle fut reprise par les troupes d’Héraclius I (610-641), mais elle tomba aux mains des musulmans en 637.
Aux deux époques, romaine et byzantine, Gaza – sur la route entre l’Egypte et les anciennes civilisations du Levant – était un port florissant dont malheureusement beaucoup de vestiges archéologiques – comme partout dans la bande éponyme – ont été perdus ou mis en danger par la sur-urbanisation, les conflits répétitifs et des années de négligence.
Fin octobre 2017, les archéologues et les défenseurs du patrimoine à Gaza ont tout de même réussi à stopper à temps la destruction déjà avancée d’un site vieux de 5 000 ans, sans garantie de sauver ce qui reste d’un témoignage exceptionnel du passé dans l’enclave palestinienne. Il s’agit du Tell es-Sakan, un site « unique » selon l’archéologue palestinien Moain Sadeq, « peut-être la seule cité cananéenne fortifiée du sud de la Palestine », occupée sans discontinuer de 3 200 à 2 000 av. J.-C. Depuis sa découverte inopinée en 1998, les lames des bulldozers ont mutilé les contours du tell. Le site ne cesse d’être rongé, morceaux par morceaux, par les engins de terrassement. Gaza est en effet en pleine explosion démographique et subit une crise du logement. C’est la troisième fois qu’un programme immobilier rogne l’endroit, cette fois pour des fonctionnaires.