Un communiqué du Patriarcat latin de Jérusalem annonce que des vandales se sont introduits par effraction dans l’église Saint-Etienne de Beit Gemal et l’ont saccagée. L’attaque a eu lieu dans la soirée du mercredi 20.
Vitraux cassées, croix brisée, statue de la Vierge fracassée, calices, ciboires et nappes d’autel jonchés sur le sol : l’église Saint-Etienne de Beit Gemal a été dévastée dans la soirée du mercredi 20 septembre 2017. A noter qu’il n’y avait pas d’hosties dans le tabernacle. « Il ne s’agit pas seulement d’un acte de vandalisme, mais aussi d’une action contre le caractère sacré des lieux saints et de la foi du peuple » a déclaré Mgr Boulos Marcuzzo, dans un communiqué du Patriarcat latin. Le nouveau Vicaire patriarcal à Jérusalem et en Palestine s’est rendu dès le lendemain sur place pour visiter l’église datant du XIXe siècle et a pu constater les dégâts. S’il reconnaît la dimension économique des biens profanés, l’évêque a en outre expliqué à l’agence AsiaNews qu’il fallait retenir du « message fanatique de cette attaque (…) une idéologie qui n’accepte pas la foi, la vision de l’autre. » Et l’évêque d’étayer : « Dans l’Ancien Testament, il est dit de détruire les statues considérées comme un symbole de l’idolâtrie. Dans le cas présent, ces personnes (ndlr : les attaquants) faussent les Ecritures et favorisent le fanatisme. Peut-être n’est-ce pas une attaque directe contre les chrétiens, mais certainement c’est un message contre ceux qui ne partagent pas leur idéologie et leur peur, car cela montre qu’il n’y a pas de respect pour les autres, que la vie sociale est compromise. » Sur les vitraux qui narrent la vie de Jésus et des saints, les visages ont été détruits.
L’attaque est intervenue alors que ces jours-ci juifs et musulmans célèbrent selon leur calendriers respectifs la nouvelle année (Rosh Ha-shana pour les uns, l’Hégire pour les seconds). Pour l’évêque, rapporte AsiaNews, l’incident est « extrêmement négatif, aussi parce qu’il a eu lieu la veille d’une célébration qui rappelle la joie et la collaboration fraternelle. » Via le communiqué du Patriarcat latin, Mgr Marcuzzo ajoute que « la Terre Sainte est un lieu qui bénéficie d’une foi profonde et d’une grande richesse culturelle. Nous devons vivre ensemble avec la diversité des croyances. Il est absolument nécessaire d’accepter les autres, de s’accepter mutuellement dans notre diversité. » La déclaration officielle du Patriarcat conclut que « l’éducation est la solution pour inculquer le respect des différences religieuses et culturelles des peuples. » L’Assemblée des ordinaires catholiques de Terre Sainte a demandé à l’Etat hébreu et à toutes les institutions concernées « de punir les agresseurs et d’inciter chaque personne à ne pas commettre de tels actes. »
Peut-être des extrémistes juifs ?
Si l’attaque n’a pas encore été revendiquée, Mgr Marcuzzo a commenté auprès d’AsiaNews que l’attaque était le fait de « quelques fanatiques » ; il est probable qu’il s’agisse d’« extrémistes juifs » précise l’agence de presse catholique. Une enquête a été ouverte pour retrouver l’identité des auteurs. Mgr Marcuzzo considère que l’attaque de mercredi s’inscrit dans les épisodes du passé. « Ce sont peut-être des extrémistes juifs, nous ne le savons pas bien et, à l’heure actuelle, il n’y a pas de résultats. Mais la matrice est celle qui se cache derrière les attaques contre Tabgha ou d’autres bâtiments chrétiens en Terre Sainte », a-t-il ajouté. Pour mémoire, le sanctuaire de Tabgha, où le Christ a procédé à la Multiplication des pains avait été incendiée en juin 2015.
Pour bien comprendre, l’église Saint-Etienne, située dans l’enceinte d’un monastère salésien se trouve non loin de Beit Shemesh à 30 km à l’ouest de Jérusalem. A Beit Gemal, le monastère des salésiens ainsi que le couvent des sœurs de la Famille monastique de Bethléem sont régulièrement la cible d’exactions commises par des juifs extrémistes issus de cette ville israélienne. Il y a deux ans, les murs de l’édifice habité par les sœurs avaient été défigurés par des graffitis blasphématoires en hébreu. En mars 2014, un acte de vandalisme avait aussi visé le monastère de Deir Rafat, où se trouve le sanctuaire de Notre-Dame de Palestine, situé là encore près de Beit Shemesh. Des graffitis anti-chrétiens et anti-américains avaient été découverts sur les murs du couvent, et portaient la marque du « prix à payer », groupuscule juif extrémiste.
Ce n’est pas la première fois non plus que le monastère salésien est vandalisé. Le 27 septembre 1981, plus de 30 croix du cimetière, à l’époque en bois, avaient été brûlées et détruites par des assaillants inconnus. Il y a huit ans une bombe avait été posée sous un tracteur. En décembre 2015, le cimetière avait été de nouveau vandalisé et plusieurs croix de tombes en bois et en béton avaient été détruites. Une soixantaine de juifs – étaient alors venus un mois après les faits exprimer leur désaccord et leur tristesse suite à cet acte de vandalisme. Le groupe à l’origine de cette initiative de solidarité appartient à une organisation fondée en 2011 pour lutter contre toutes les formes de racisme en Israël, en coordination avec d’autres organisations qui poursuivent le même but. Le nom de cette organisation est « TAG Meir » (light tag), par opposition à une autre organisation de colons ultra-nationalistes religieux appelée TAG Mehir (price tag – prix à payer) : c’est leur signature lorsqu’ils vandalisent une mosquée ou un lieu chrétien (le sanctuaire bénédictin de la multiplication des pains de Tabgha, le monastère cistercien de Latroun, l’abbaye bénédictine de la Dormition, située sur le mont Sion à Jérusalem). La politique du TAG Mehir consiste à se venger sur des villageois palestiniens, des lieux de culte musulmans et chrétiens des décisions gouvernementales israéliennes qu’une poignée d’extrémistes juifs jugent hostiles à leurs intérêts.