La victoire de Benyamin Netanyahu n’est pas forcément le pire scénario pour Mahmoud Abbas et l’Autorité palestinienne. Les propos outranciers, la continuation d’une politique de colonisation et les frictions avec les Etats-Unis pourraient in fine servir les intérêts palestiniens qui engrangent les soutiens internationaux.
(Jérusalem/n.k.) – Le vainqueur n’est pas forcément celui que l’on croit. Si Benyamin Netanyahu a bel et bien remporté les élections législatives la semaine dernière (voir notre article à ce sujet : Elections israéliennes, quelle coalition pour le Likoud ?), une victoire stratégique pourrait à terme être acquise au leader de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas.
C’est peu dire que les dernières années n’ont pas été synonymes d’espoir pour la Palestine. La politique conduite par l’homme fort du Likoud n’a cessé de crisper les tensions avec l’Autorité palestinienne, que ce soit par la continuation de la colonisation en Cisjordanie et à Jérusalem-Est, ou par les nombreuses opérations militaires à Gaza. La rhétorique du Likoud n’a également cessé de se durcir, atteignant des sommets lors de la campagne électorale (Bibi déclarant le jour du scrutin que les arabes arrivaient « par bus entiers », soutenus par des « intérêts financiers étrangers »).
Ainsi, le « processus de paix » ne semble plus être aujourd’hui qu’un slogan peu reluisant.
Face à cela, Mahmoud Abbas a parfaitement compris qu’il n’y avait pas de partenaire pour une solution politique du côté israélien. Preuve en est, Benyamin Netanyahu a déclaré dans les derniers jours de campagne qu’il s’opposerait à toute forme d’Etat palestinien (avant de dire le contraire après son élection). La droite ultra-nationaliste avec laquelle Bibi ne peut que s’allier pour former sa coalition a également multiplié les propos racistes contre les arabes.
Pour le vieux chef de l’Autorité Palestinienne, « les déclarations de Benyamin Netanyahou contre la solution à deux Etats et les appels de son ministre des Affaires étrangères Avigdor Lieberman à tuer les Arabes d’Israël prouvent, si elles sont vraies, que le gouvernement israélien ne veut pas sérieusement d’une solution politique ».
Du côté palestinien en effet, personne ne s’attend à des concessions israéliennes sur les échanges de prisonniers, les transferts de fonds ou la colonisation. L’exécutif palestinien a donc choisi de laisser le gouvernement israélien s’enliser dans sa radicalité, pour aller chercher du soutien à l’international.
Les derniers mois de l’année 2014 ont vu un mouvement important de motions parlementaires européennes en faveur d’un Etat Palestinien. Ces reconnaissances sont pour l’instant symboliques, mais nécessaires à Mahmoud Abbas.
De toute évidence, le vrai travail diplomatique est à réaliser auprès des Etats-Unis, soutien le plus précieux d’Israël.
Là-encore, la politique du gouvernement israélien sert les intérêts palestiniens comme jamais.
Les relations entre Barack Obama et Netanyahu sont, de notoriété publique, exécrables. Mais depuis quelques semaines, il apparaît clairement que les indélicatesses israéliennes risquent de ne pas rester sans réponses.
Le discours controversé de Bibi au Congrès américain, l’usage des députés républicains contre Obama pour torpiller l’accord sur le nucléaire iranien, ou plus récemment les affaires d’espionnage des négociations américano-iraniennes semblent décider les Etats-Unis à riposter.
Plusieurs signaux ont été envoyés par l’administration américaine pour indiquer qu’Israël avait du souci à se faire. Barack Obama a ouvertement critiqué les propos de campagne de Netanyahu, regrettant l’« érosion de la démocratie israélienne », et promettant de « réévaluer les relations bilatérales entre les deux pays après l’élection ».
La presse fait également écho de la volonté de la Maison Blanche de changer sa politique à l’ONU concernant Israël. Le veto américain pourrait ne plus être opposé à la création d’un Etat palestinien ou aux sanctions contre Israël.
Si l’allié américain relâche son soutien, c’est à coup sûr une forme de victoire pour la Palestine, et indirectement pour Mahmoud Abbas qui voit sa stratégie internationale confirmée.
« Nous ne sommes pas face à un gouvernement, mais face à une bande de voyous » a-t-il déclaré lors de son audition par le comité central de l’OLP.
Prochaine étape de cette stratégie, la poursuite d’Israël pour crimes de guerre devant la Cour Pénale Internationale.