Face à la montée de l’islamisme, les chrétiens de Mossoul en Irak sont à nouveau contraints de fuir
La communauté chrétienne de Mossoul, en Irak, l’une des plus anciennes du Moyen-Orient, risque de disparaître définitivement. En effet, la ville qui compte près de trois millions d'habitants, est depuis le 10 juin sous le contrôle de la milice de l'État islamique en Irak et au Levant, un groupe proche d'Al-Qaïda.
(c.g.) – La communauté chrétienne de Mossoul, en Irak, l’une des plus anciennes du Moyen-Orient, risque de disparaître définitivement. « Actuellement, tous les fidèles ont fui la ville – a dénoncé Mgr Shimon Amel Nona, archevêque chaldéen de Mossoul, à la Fondation Pontificale Aide à l’Église en Détresse (AED) -. Qui sait si nous pourrons revenir un jour… ».
Mardi 10 juin, en effet, Mossoul, qui compte près de trois millions d’habitants et qui se situe à 350 kilomètres au nord de la capitale, Bagdad, est tombée sous le contrôle de la milice de l’État islamique en Irak et au Levant. L’EIIL (acronyme) est une organisation qui par ses méthodes et ses objectifs est proche des terroristes d’Al-Qaïda. Depuis plusieurs années, ils combattent en Syrie et en Irak pour instaurer un califat islamique. La conquête de Mossoul est une accélération inquiétante vers un chaos total en Irak.
Selon les observateurs, après l’entrée de combattants islamistes dans la ville, des centaines de milliers de personnes ont fui vers la plaine de Ninive ou vers la frontière avec la Turquie. Parmi eux, on compte aussi beaucoup de chrétiens. D’après les rapports de l’Annuaire pontifical 2013, il y aurait plus de 50 mille catholiques orientaux : environ 14 000 Chaldéens et 42 000 Syriaques. Une communauté très ancienne (ses origines remontent au deuxième siècle de notre ère), mais très active, grâce à 27 paroisses, près de 70 prêtres et des milliers de nouveaux baptisés en 2013. En réalité, au cours des dix dernières années, de nombreux chrétiens avaient déjà décidé de fuir, face aux conditions de vie insoutenables qui sévissent à travers tout le pays. Selon le site d’information en anglais Irak body count, depuis 2003 – année de l’invasion américaine de l’Irak – jusqu’à aujourd’hui, environ 130 000 personnes ont été victimes du désordre et de la violence. Une situation qui s’aggrave progressivement : de 2012 à 2013, en effet, le nombre de morts a doublé (de 4500 à 9500) ; et les cinq premiers mois de 2014 ont vu tomber plus de 5000 personnes. Mais ce n’est pas tout : d’après l’ONU, à la fin de 2013 le nombre de réfugiés en Irak s’élevait à 1 million et 591 000 personnes, dont 350 000 réfugiés syriens, et un million d’Irakiens déplacés à l’intérieur-même du pays.
«Nous n’avons jamais rien vu de tel. Une grande ville comme Mossoul en prise au chaos et aux groupes qui l’ont attaquée – déclare Mgr Nona -. L’armée a commencé à bombarder les milices islamistes, mais plus tard dans la nuit, entre lundi et mardi, les forces armées et la police ont brusquement quitté Mossoul, la laissant à la merci des assaillants ».
Depuis, il a été rapporté que l’EIIL a également attaqué quatre églises et un monastère. « Nous continuons à prier pour que notre pays puisse enfin trouver la paix – dit Mgr Nona -. Ce n’est pas facile après tant d’années de souffrance, mais nous, chrétiens irakiens, nous sommes ancrés dans notre foi, et nous devons garder espoir, même sous la persécution. C’est un énorme défi, surtout après ce qui s’est passé ces derniers jours ».
En février dernier, l’EIIL avait déjà pris le pouvoir dans la ville syrienne de Raqqa, en imposant la jizya aux chrétiens, une taxe réservée aux non-musulmans, établissant ainsi un système juridique de discrimination. Par peur de ce qui s’est passé dans les régions voisines, de nombreux chrétiens de Mossoul avaient préféré s’en aller.
En plus de Mossoul, les terroristes de l’EIIL se sont également emparés d’une autre ville, Baiji, où se trouve la plus grande raffinerie de tout l’Irak. Cette action confirme la stratégie de «sabotage économique» que les fondamentalistes islamiques ont toujours mis en œuvre en Irak, privilégiant les attentats contre les pipelines qui transportent le pétrole irakien vers les pays étrangers, en entraînant ainsi une grosse perte financière pour le gouvernement.