Le 29 décembre, le président libanais Michel Sleiman a déclaré avoir accepté une subvention de 3 milliards de dollars du roi saoudien Abdullah, afin d’augmenter le financement de l'armée. L’initiative saoudienne a été interprétée comme un acte anti-chiites, et donc contre l'Iran, le Hezbollah et le gouvernement syrien. La France devrait vendre de nouvelles armes au Libanais.
(Milan / c.g.) – Les effets du conflit syrien continuent à secouer dangereusement Liban. Le 29 décembre, le président libanais Michel Sleiman a déclaré avoir accepté une subvention de 3 milliards de dollars du roi saoudien Abdullah, afin d’augmenter le financement de l’armée nationale, « afin qu’elle puisse protéger le pays – a-t-il dit – contre l’extrémisme et le sectarisme ». «Renforcer l’armée est une demande partagée par tout le monde au Liban », a dit le président, ajoutant que les forces armées libanaises utiliseront les fonds saoudiens pour acheter des armes à la France.
L’annonce du président libanais arrive à un moment délicat pour le pays : dimanche, des tirs d’obus de mortier sont tombés sur Israël depuis le territoire libanais, provoquant l’intervention armée israélienne. On ne sait encore qui en est responsable ; vendredi, à Beyrouth, un attentat à la voiture piégée a tué sept personnes et fait 70 blessés. Parmi ceux qui sont tombés, on cite Mohamad Chatah, musulman sunnite, ancien ministre des Finances et ancien ambassadeur aux États-Unis, premier membre de la Coalition du 14 Mars, alliance politique qui rassemble les principaux partis libanais de l’opposition, défavorables au Hezbollah chiite et unis contre l’historique ingérence syrienne au Liban, et contre le président syrien, Bashar al Assad.
L’assassinat de Chatah a suscité de vives protestations de la part de la Coalition du 14 Mars, qui en a imputé la responsabilité au Hezbollah. Dimanche, la foule rassemblée pour les obsèques de l’ancien ministre à la grande mosquée Mohammad al-Ami, dans le centre de Beyrouth, criait des slogans tels que « Il n’y a pas d’autre Dieu qu’Allah et le Hezbollah est un ennemi d’Allah ». Au cours de son oraison funèbre, l’ancien Premier ministre sunnite Fouad Siniora a harangué la foule en disant que la Coalition du 14 Mars sera « libèrera le Liban de l’occupation armée illégale du Hezbollah, dans une bataille pacifique et démocratique ».
Dans ce scénario, le don de 3 milliards de dollars fournis par l’Arabie saoudite, pouvoir sunnite du Moyen-Orient, peut être interprété comme un acte anti-Hezbollah, anti-Assad et anti-Iran, principal antagoniste chiite sur l’échiquier. Ce financement pourrait fournir à l’armée libanaise une supériorité militaire contre le mouvement chiite qui, en effet, possède sa propre armée.
Un renforcement de l’armée libanaise obligerait le Hezbollah à se concentrer sur le front intérieur, détournant ainsi ses efforts sur le front syrien, où aujourd’hui 3 000 à 3 500 combattants s’y seraient rendus. La diminution du nombre de milices chiites libanaises en Syrie pourrait être un avantage stratégique pour les opposants sunnites au régime d’Assad. D’autre part, l’escalade des tensions entre chiites et sunnites au Liban devient de plus en plus inquiétante, et fait ressurgir les souvenirs des désastres de la guerre civile (1975-1990).
L’attentat dans lequel a été tué l’ancien ministre Chatah est le dernier d’une série de massacres qui ont eu lieu au Liban ces derniers mois. Ces attentats ont cependant fait plus de victimes chiites, tant à Beyrouth qu’à Tripoli, faisant plus de cent morts et des centaines de blessés. Pour leur part, les dirigeants du Hezbollah ont condamné l’attaque : « Le Hezbollah exprime sa ferme condamnation de ce crime odieux qui avait comme objectif le ministre Chatah, faisant de lui un martyr, ainsi que de nombreux civils libanais ». « Le Hezbollah est convaincu que cette série de crimes et d’attentats à la bombe visent à saboter le pays. Une tentative immorale pour déstabiliser le pays et l’unité nationale qui ne profite qu’à l’ennemi ».