Mgr Sabbah: des pistes pour l’entente entre chrétiens et musulmans en Palestine
Dans le cadre d’un congrès intitulé « Entente entre musulmans et chrétiens à Gaza », Mgr Michel Sabbah a proposé « un examen de conscience (…) plein, à la fois, d’amitié et de vérité ». Le patriarche latin émérite entend ainsi définir les conditions de « la bonne entente » et de « la coexistence » entre musulmans et chrétiens à Gaza. Le congrès était organisé par l’Association palestinienne Réconciliation Nationale. Il s’est tenu en présence de chrétiens, de musulmans et de représentants de courants islamistes.
(Jerusalem / CD) Lors du congrès « Entente entre musulmans et chrétiens à Gaza », organisé la semaine dernière à Gaza à l’initiative de l’Association palestinienne Réconciliation Nationale, Mgr Michel Sabbah a présenté les trois angles sous lesquels il faut, selon lui, envisager les relations entre chrétiens et musulmans pour tendre à « l’unité de la société palestinienne ».
Pour le prélat, la relation entre chrétiens et musulmans repose d’abord sur « le sentiment d’unité nationale ». Ainsi, « la relation entre musulman et chrétien est d’abord une relation de citoyen à citoyen : tous deux partagent les mêmes épreuves, et conjuguent leurs efforts pour servir la même cause et arriver à réaliser : unité, liberté, dignité, retour à la terre et indépendance ». Mgr Sabbah invite ainsi les Palestiniens à ne pas faire de l’appartenance à une religion ou à un courant religieux un « facteur d’affaiblissement et de division dans le pays ».
La relation entre musulmans et chrétiens, relation de citoyenneté commune, est aussi une relation de croyant à croyant. Mgr Sabbah invite à reconnaître « la foi en un seul Dieu en deux religions différentes ». Il a également mis l’accent sur l’importance de la fidélité de chacun à sa religion qui « consiste, pour chacun, à voir, dans son cœur, le Dieu Créateur, et, en toute personne humaine, la créature de Dieu et son successeur sur la terre. »
Enfin, la relation entre musulman et chrétien est une relation de personne humaine à personne humaine. Cette égalité en dignité est fondée sur le fait que « Tout être humain est une personne humaine, créée par Dieu et tenant sa dignité de la dignité même de Dieu. »
Les conditions de « la bonne entente »
Mgr Sabbah est également revenu sur l’organisation de ce congrès autour du thème de l’entente entre musulmans et chrétiens. Pour lui, « un tel congrès affirme et encourage l’amitié et le respect mutuels ». Mais pour signer un traité de « bonne entente et de coexistence » entre chrétiens et musulmans, il a rappellé la nécessité de faire « un examen de conscience » des relations actuelles.
S’adressant aux responsables politiques, Mgr Sabbah a remercié « les autorités du Hamas {qui} ont fait le nécessaire» lors de heurts survenus à Gaza entre les deux communautés. Et il a ajouté : « La survie des chrétiens Palestiniens, en Palestine et à Gaza, est une exigence fondée sur la nature même de la Palestine : c’est la Terre Sainte où est née le christianisme. » Et il poursuit : « La survie des chrétiens {en Palestine} est certes une question chrétienne, mais elle est aussi une question palestinienne et arabe. {…} À ce sujet, je dis à toutes les forces et courants islamiques à Gaza: soyez fidèles à l’islam, mais il est de votre devoir de garder les chrétiens chrétiens et non pas d’en faire des musulmans. »
Mgr Sabbah a souligné que la disproportion en nombre au sein de la société palestinienne entre chrétiens et musulmans « requière un effort spécial de la société musulmane ». En effet « ce qui est imposé au musulman, parce qu’il est musulman, ne peut pas être imposé au chrétien » car « Dieu a créé l’homme libre et la liberté que Dieu lui a donné, nul ne peut la lui ôter ».
D’autre part, de l’examen de quelques situations de conflit entre société chrétienne et musulmane, Mgr Sabbah tire une leçon : « Il faut des sermons clairs et nets, dans les mosquées et dans les églises et une éducation religieuse saine dans nos écoles, qui avertissent les gens et les invitent à prendre conscience de leur propre dignité, de leur fraternité et de leur unité. »
Enfin, avant de terminer son intervention, le Patriarche émérite de Jérusalem s’est adresse aix musulmans palestiniens : « Si quelques-uns, parmi vous, disent que nous ne sommes pas des frères, nous {chrétiens}, en revanche, nous réaffirmons et nous tenons à vous dire que vous êtes des frères : soyez musulmans et soyez palestiniens ».