Gaza. La seule évocation de ce nom fait tomber sur les matins les plus ensoleillés une chape de misère. Mais on rit aussi à Gaza, on espère aussi à Gaza, on rêve aussi à Gaza. Et Mohamed Abusal a eu un rêve, une « vision » dit-il. Pour Gaza, il a rêvé d’un métro et il l’a dessiné.
Gaza. La seule évocation de ce nom fait tomber sur les matins les plus ensoleillés une chape de misère. Mais on rit aussi à Gaza, on espère aussi à Gaza, on rêve aussi à Gaza. Et Mohamed Abusal a eu un rêve, une « vision » dit-il. Pour Gaza, il a rêvé d’un métro et il l’a dessiné.
On a beau être artiste, on en n’est pas moins coincé dans les encombrements de cette ville où, pour palier la cherté du carburant (ou le manque), les ânes ont repris du service, où les taktak rivalisent avec les taftaf, tous triporteurs courts et longs plus économiques que les voitures et qui ont le bon goût de pouvoir passer par les tunnels creusés sous la frontière égyptienne.
Ainsi donc, Mohamed, contemplant les rues défoncées, les véhicules improbables, les licences prises avec ce qui pourrait s’apparenter à un code de conduite eut l’idée de dessiner un métro pour Gaza. Bénéficiant d’une bourse du Consulat général de France à Jérusalem et des fondations Al Ta’awun et Al Qattan, il partit quatre mois en résidence à Paris « J’ai pu me familiariser avec le métro parisien, méditer sur le plan de métro et les stations, les correspondances, les signalisations, les tunnels, les bouches qui avalent puis recrachent les voyageurs. Puis j’ai commencé à imaginer l’impact psychique que ce projet pourrait avoir sur les spectateurs gazaouis. J’ai visité la compagnie du métro parisien RATP et le Musée des Arts et Métiers afin de donner à mon projet une véritable dimension de recherche scientifique. » Explique-t-il dans la Lettre d’information du Consulat Général de France.
Et Mohamed dessina un métro, du moins son plan car « la cartographie de la bande de Gaza se prêtait parfaitement à un réseau de lignes de métro souterraines. » et c’est effectivement à s’y méprendre. Que n’existe-t-il ce métro ? Pour Gaza, ses 360 kilomètres carrés, sa surpopulation de 4000 habitants au kilomètres carré, loin derrière Singapour, juste avant le Vatican ! et 4e « entité politique » la plus peuplée au monde.
Que n’existe-t-il ce métro que Mohamed a rêvé « accessible à tous, fonctionnant sur une énergie durable provenant d’Égypte, qui ne soit pas victime de bombardements ni soumis au blocus, qui ne soit pas dépendant des soubresauts politiques, qui ne connaisse pas de séparation entre les hommes et les femmes dans les rames, qui fonctionnerait du matin jusqu’au bout de la nuit, et dont les conducteurs auraient de préférence une expérience en matière de transports publics. »
Alors Mohamed a voulu donner chair à son projet, il a dessiné un panneau signalétique de bouche de métro. Il l’a fait fabriquer et est allé le planter à la sortie des stations qu’il a imaginées. Devant la plage, dans un quartier dévasté par un bombardement, dans une artère ultra passante de la ville. Et il a fait ainsi entrer les gazaouis dans son rêve. « Les passants ont été immédiatement interpelés, raconte Mohamed, et leurs réactions exprimaient à la fois l’enchantement et l’ironie, l’optimisme et la frustration, la candeur et l’incrédulité, l’espérance et le désespoir, comme : « le signe M, ça veut dire qu’il y aura un nouveau port (« mina » en arabe) pour les pêcheurs ? » ; « Ça me rappelle le métro en Égypte : je vais prendre une photo avec mon portable et faire croire à ma femme que j’étais en Égypte » ; « Je ne suis pas d’accord avec ce projet, qui menace nos emplois! » s’est plaint un chauffeur de taxi ; « avec ce projet, nous pourrons enfin avoir un peu de calme »…
Gaza n’a pas encore de calme… ni non plus de métro… Mohamed, lui, a un poteau électrique surmonté d’un grand M orange. Il a aussi une collection de photographies, celles qu’il a prises à la sortie de ses bouches de métro obstinément closes.
Il les a… et il ne les a plus… Mohamed est à Gaza, mais ses photos sont en cours d’acheminement vers la Cisjordanie où l’exposition « Un métro pour Gaza » devrait être exposée et tourner dans les centres culturels français de Ramallah et Naplouse, Jérusalem peut-être, à partir de la mi-février pour que le rêve soit contagieux et nourrisse les espoirs qui demeurent.
Pour voir les photos de Mohamed Abusal rendez-vous sur son site internet.